13/02/2008
Lu 22 - Jours Déchaux de Jean-Vincent Verdonnet, J
Jours déchaux, et certes l’on pense à ces jours qui vont déchaussés par le temps qui se fait de plus en plus prégnant. Né en 1923, riche d’une œuvre importante publiée pour l’essentiel par les éditions Rougerie qui sous le titre Où s’anime une trace en ont repris l’essentiel en quatre tomes, Jean-Vincent Verdonnet n’en continue pas moins à « interroger / ce frémissement dans les arbres / qui ne (l’) aura jamais lassé ».
Pour « déchaux » qu’ils soient ces jours, le poème leur assure encore une prise au sol comme les entours dont Jean-Vincent Verdonnet a toujours eu un sens aigu permettent de « pressentir l’invisible » au « trouble » qui mêle les couleurs d’octobre en un timbre inouï dont le poète s’est si souvent demandé s’il a « un nom / et dans le fond de quel abîme ».
L’essentiel me semble dit là. Jean-Vincent Verdonnet est le poète attentif à ce qui dans le cœur battant d’un paysage se donne à entrevoir dans l’écoute attentive pour peu que nous sachions nous oublier de nous-mêmes ces oripeaux imaginaires qui nous tiennent lieu de moi. C’est cela qui laisse trace, une vibration qui passe sur les choses, une lumière déjà passée, « lueur intermittente / où les extrêmes se rejoignent ».
Déchaux pouvait paraître comme un étrange adjectif, on voit combien il est ajusté aux deux principales caractéristiques de Jean-Vincent Verdonnet : sa cambrure, d’une part, soit cette manière d’aller dans le monde avec légèreté, court chaussé et porteur d’un regard qui laisse venir jusqu’à lui les choses et les êtres du monde jusqu’à épanouir d’autres yeux dans nos yeux et d’autre part, son écriture toujours aussi fluide, fruit d’une lutte amoureuse au sein du langage, qui sait se rendre poreuse aux sollicitations du dehors qui finit par affleurer entre les noirs de l’encre.
Oui, Jean-Vincent Verdonnet est un marcheur déchaux ! Il va sandales sans bas depuis toujours. Mal chaussé eu égard aux chemins empruntés. Non balisés. Mal assurés. Chemins toujours en avance sur nos pas. Chemins en quête de la piste perdue qui mènerait au lieu où l’invisible prendrait visage et où cesserait notre exil.
Déchaux certes mais obstiné. Tremblant certes mais espérant. Patient. De là cette douceur qui se dégage de la poésie de Jean-Vincent Verdonnet. Sa fraîcheur. Celles des braises sous cendres.
22:30 Publié dans Du côté de mes interventions | Lien permanent | Commentaires (0)
05/02/2008
Jacques Ancet - Je reviens (extrait d'un travail en cours)

Il est l’auteur d’une trentaine de livres (poèmes, romans, essais) dont, récemment, Diptyque avec une ombre (Arfuyen, 2005), Prix Charles Vildrac 2006 de la SGDL et prix Heredia 2006 de l’Académie Française, La ligne de crête (Tertium éditions, 2007), Entre corps et langage, anthologie d’Yves Charnet, (L’idée bleue/Ecrits des forges 2007) et Journal de l’air (Arfuyen, 2008).
Traducteur de langue espagnole (Jean de la Croix, Aleixandre, Cernuda, Valente… ) il vient de publier Clarté sans repos (Arfuyen), Cecilia (Lettres Vives), d’Antonio Gamoneda,, L’homme et le divin de María Zambrano (José Corti), Lettres aux hirondelles et à moi-même, de Ramón Gómez de la Serna (André Dimanche) et L’opération d’amour de Juan Gelman (Gallimard).
Il a obtenu le Prix Nelly Sachs en 1992,, le prix Rhône-Alpes du Livre en 1994 et la Bourse de traduction du Prix Européen de Littérature Nathan Katz en 2006.)
J'écrivais à propos d'un morceau de lumière (Voix d'encre) que c'était un livre d’encre et de chair dont on tournait les pages et qu'entre elles, une lumière filtrait et passait vibrante pour aller rayonner plus loin. Que cette lumière, on la retrouvait dans La dernière phrase (Lettres Vives)comme celle qui nous restait, nous manquant toujours. Elle passe dans les poèmes de Jacques Ancet, rayonne comme un fil de jour s’obstine à accompagner « ce qui s’en va », cette vie qui passe sans se retourner, » comme un passage d’oiseaux » éclaire le ciel, « comme le jour commence ».
Je reviens, j’ai été absent des semaines, le vent pourtant n’a cessé de souffler & la lumière d’éclairer les visages
je reviens le ciel retombe sur mes yeux avec une lenteur d’enfance, je ne sais plus si c’est bien moi
qui parle ou si de moi ne reste que ce peu de paroles éparpillées que je ne reconnais plus
mais je reviens, écoutez, le monde me traverse toujours, il a des flaques de sang, des mouches, une douleur trop grande pour être dite
le monde est noir & il fait mal, le monde, il a des petits yeux méchants, ils vous regardent, vous épient
vous entrez dans une histoire sans queue ni tête, on dit c’est la vie, elle vous regarde de loin déjà, elle vous mange
alors comment revenir comment dire c’est moi regarde c’est moi encore je suis là
pour la montagne et pour l’herbe, pour le cri de la corneille, le chêne & la clôture
pour tout ce que j’ignore, mais qui réclame un peu de place entre mes mots, un fil luisant entre feuille & pierre
un peu de terre sous la semelle, ce numéro de téléphone sans visage & sans voix, trop de feuilles sèches pour la saison
je reviens, mais qui m’a attendu, les pièces sont vides, quand j’y entre, je ne trouve qu’un peu de poussière au bord des fenêtres
& les taches pâles des tableaux absents sur les murs, le jour est un désert trop encombré de phrases & d’objets
les vaches broutent dans nos chaussures
leur souffle chaud fait une buée où nos yeux s’évaporent
15:25 Publié dans Inédits, Mes ami(e)s, mes invité(e)s | Lien permanent | Commentaires (2)
02/02/2008
Lu 21 - Giacometti/Dupin -Eclats d'un portrait
( Est paru chez André Dimanche éditeur (39 euros) de Jacques Dupin, Alberto Giacometti Eclats d’un portrait avec des photographies de Ernst Scheidegger )
Il ne s’agit pas pour Dupin de dire on ne sait trop quelle vérité sur ce qui s’est passé dans cet atelier mais dans le jeu entre les images reproduites ici et les mots de Jacques Dupin de dire au plus juste. De reprendre. Porter plus avant le souvenir, cela est relever. Porter hier dans un futur.
Le porter au plus près de cette avancée dans l’inconnu, après que le premier trait comme le premier pas ait introduit le porte-à-faux d’un déséquilibre. Et c’est alors comme un souffle toujours là à tisonner le feu qui à brûler toujours plus, s’effondre braise sur braise. Et c’est cet éboulement, celui d’une interrogation qui s’entretient interminablement elle-même, qui tient, trait à trait, comme tiré du vide et devant nous porté comme devant le regard perdu de Giacometti. Qu’il dessine ou sculpte – les deux séries de photographies sont superbes de complicité attentive – une tête – celle de Dupin, « tête d’un autre dans le regard d’Alberto » écrit-il – surgit moins qu’elle ne se déclôt, sur la toile ou dans le bloc de terre, trait pour trait, pétale de terre après pétale de terre, comme autant de saetas, flèches sonores qui déchirent le ciel vide, à partir d’un tout perdu, ce fantôme de tête que Giacometti a perdu, explique Dupin, à peine s’est-il emparé du pinceau ou de la terre.
Il est ainsi très émouvant de suivre Giacometti et Dupin avancer dans l’ignorance de la fin sans souci d’arriver. Etrange voyage vers la figure ! Vers ce qui se dérobe toujours alors même qu’elle s’affirme, se cache alors qu’elle se montre, se détruit alors qu’elle se construit. Etrange construction dont le processus est de démolition ! Ici travaille la ruine. C’est elle qui édifie, trait contre trait ; coup de pouce contre coup de pouce. Ce qui élève abaisse, ce qui amoindrit relève.
Ce livre est l’autre scène d’une danse . Celle de mains funambules, amoureuses du vide.
18:55 Publié dans Du côté de mes interventions, Inédits | Lien permanent | Commentaires (5)
Balise 26 - La santé par les livres
« Il y a toujours une joie indescriptible qui jaillit des grands livres, même quand ils parlent de choses laides, désespérantes ou terrifiantes. Tout grand livre opère déjà la transformation, et fait la santé de demain. » Gilles Deleuze
Si j'ai une âme de Vincent Peyrel (collection Thoth, éditions de l'Amourier. Contact : amourier.com) est de ceux-là. Il faut lire l'article sur remue.net de Claudine Galea : Le festin et les restes à ce sujet. (Claudine Galea qui nous avait confié L'Heure blanche. Texte inédit que vous trouverez dans la catégorie "Mes ami(e)s, mes invité(e)s" de novembre 2007.)
18:10 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (1)
Jeanne Bastide - L'intimité de la lumière
Vient de paraître L'intimité de la lumière avec des sérigraphies de Yves Picquet aux éditions Double
cloche (contact: edition.double.cloche@orange.fr).
24 exemplaires sur vélin d’arches 250g au format 26x18 cm ont vu le jour. Ils sont présentés dans un emboîtage réalisé par Jeanne Frère. (prix unitaire T.T.C :330 euros).
On trouvera dans la catégorie "Mes ami(e)s, mes invité(e)s de Janvier 2008 un extrait du texte de Jeanne Bastide: La lumière arrive.
17:57 Publié dans Mes ami(e)s, mes invité(e)s | Lien permanent | Commentaires (0)
20/01/2008
Lu 20 - Avec Guillevic sur le chemin des sèves
( cet article est paru dans une version abrégèe dans L'Humanité du jeudi )
Il s'agissait de fêter le centenaire de la naissance de Guillevic et de faire signe vers deux publications importantes:D'abord, Possibles futurs, Poésie/Gallimard, cat 2; puis, Relier, poèmes (1938-1996) NRF, Gallimard,29 euros.)
2007 : que de centenaires ! De René Char à Maurice Blanchot en passant par André Frénaud, Georges Schéhadée , comment pourrais-je oublier Eugène Guillevic dont s’est aussi le dixième anniversaire de la mort ? À côté de colloques, exposition, rencontres – j’écris cette chronique alors que se déroule bien loin de mes montagnes un Hommage à Guillevic à Saint-Arnoult-en-Yvelines, Maison Elsa Triolet et Aragon - des publications. Si je commencerai par signaler Du pays de la pierre aux éditions de la différence qui réunit le poète, Lucie Guillevic-Albertini et le sculpteur Boris Lejeune, les deux livres des éditions Gallimard retiendront mon attention. Le premier, c’est la réédition de Possibles futurs dans la collection Poésie/Gallimard ; le second, Relier est un fort volume – quelques 800 pages ! – que nous devons aux soins attentifs de son épouse qui a réuni les recueils ou poèmes parus entre 1938 et 1996.
17:55 Publié dans Du côté de mes publications, Inédits | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : littérature, poésie
19/01/2008
Table ronde sur le N°de la revue Europe consacré à Michel Butor le vendredi 25 janvier 2008 à la BMVR Louis Nucéra à Nice à 17hs
17:15 Publié dans Du côté de mes interventions | Lien permanent | Commentaires (0)
08/01/2008
Aux passant(e)s du blog
Ami(e)s connus, moins connus voire inconnus qui passez par les mailles de la toile sans vous y prendre que 2008 vous accorde l’énergie nécessaire à la réalisation des projets qui vous tiennent le plus à cœur. Et le cœur !
Energie nécessaire pour cette fermeté dont parle Kafka dans son aphorisme 21 quand il évoque « une main tenant une pierre ». Main qui ne « la tient ferme que pour la relancer encore plus loin, aussi loin que mène le chemin. »
15:55 Publié dans Du côté de mes interventions | Lien permanent | Commentaires (3)
Exposition « Joë Bousquet, j’habite au milieu des couleurs » du 30 novembre 2007 au 01 mars 2008 à la Maison des Mémoires – Maison Joë bousquet, 53 rue de Verdun, 11000 Carcassonne (tel/fax : 0468725083)
(Conçue par Le centre Joë Bousquet et son temps en partenariat avec le Conseil Général de l’Aude, l’exposition propose un cheminement dans l’univers de Joë Bousquet.
Des rencontres réunissant Yannick Bellon, Eric Le Roy, Serge Bonnery, André Cariou, Anne Cathala, Michaël Glück, Sylvie Gonzalez, Anne Gualino, Rose-Hélène Iché, Yolande lamarin, Adriano Marchetti, Doiminique Rabourdin, Alain Freixe et bernard Noël, se sont déroulées les 30 novembre et 1 et 2 décembre 2007.
Les œuvres présentées : peintures, photographies, sculptures, ouvrages, revues, documents témoignent des liens vitaux que le poète a entretenu avec les créateurs entre les années 1925 et 1950.)
« Les peintres m’ont comblé. Quand j’étais aussi pauvre qu’eux, ils m’ont fait de ma chambre une
demeure enchantée. »
Joë Bousquet à Maurice Nadeau
On l’aura compris, il ne s’agissait pas pour les concepteurs de l’exposition de courir après les pièces telles que mais de tenter d’évoquer l’atmosphère de ce « repaire amoureux », ce « lieu souterrain » dont Bousquet disait – Et c’est le titre même de l’exposition ! – que là, « il habitait au milieu des couleurs », que sa vie même était dans ces « réalités éruptives »
Pari gagné !
A parcourir salles et couloirs, c’est un vent et une lumière qui vous accompagnent : vent qui porte haut l’écho d’une rébellion qui avait subordonné « toutes les activités esthétiques à une idée morale de l’homme » ; lumière d’un refus de tout ce qui asphyxie l’homme et le voue à l’écoeurement.
15:40 Publié dans Du côté de Joë Bousquet, Du côté de mes interventions | Lien permanent | Commentaires (0)
Balise 25 - Marx et la "parole d'étranger"
« Le seul langage compréhensible que nous puissions parler l’un à l’autre est celui de nos objets dans leurs rapports mutuels.
Nous serions incapables de comprendre un langage humain : il resterait sans effets. Il serait compris et ressenti d’un côté comme prière et imploration, et donc comme une humiliation : exprimé honteusement, avec un sentiment de mépris, il serait reçu par l’autre côté comme une impudence ou une folie et repoussé comme telle.
Nous sommes à ce point étrangers à la nature humaine qu’un langage direct de cette nature nous apparaît comme une violation de la nature humaine ; au contraire, le langage aliéné des valeurs matérielles nous paraît le seul digne de l’homme, la dignité justifiée, confiante en soi et consciente de soi. »
Karl Marx
15:27 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (0)
Martin Miguel – Peindre / Perdre – Galerie de la Marine du 13 deécembre 2007 au 09 mars 2008 à Nice


15:24 Publié dans Mes ami(e)s, mes invité(e)s | Lien permanent | Commentaires (0)
Jeanne Bastide - La lumière arrive

Elle publie régulièrement en revue. Lucarnes aux éditions de L’Amourier, collection Thoth, est son premier récit.
15:15 Publié dans Inédits, Mes ami(e)s, mes invité(e)s | Lien permanent | Commentaires (0)