22/04/2009
Balise 46 - Et qu'on se le dise!
Marcel Proust écrit ceci à Mme Straus, veuve de Georges Bizet:
"La seule manière de défendre la langue, c'est de l'attaquer, mais oui, Madame Straus. Parce que son unité n'est faite que de contraires neutralisés d'une immobilité apparente qui cache une vie vertigineuse et perpétuelle."
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09/04/2009
Balise 45 - Gilles Deleuze, Image et ritournelle
"L'image est une petite ritournelle, visuelle ou sonore, quand l'heure est venue :« l'heure exquise... ». Dans Watt, les trois grenouilles entremêlent leurs chansons, chacune avec sa cadence propre, Krak, Krek et Krik. Les images-ritournelles courent à travers les livres de Beckett. Dans Premier amour, lui, voit se balancer un coin de ciel étoilé, et elle, chantonne à voix basse. C'est que l'image ne se définit pas par le sublime de son contenu, mais par sa forme, c'est-à-dire par sa « tension interne », ou par la force qu'elle mobilise pour faire le vide ou forer des trous, desserrer l'étreinte des mots, sécher le suintement des voix, pour se dégager de la mémoîre et de la raison, petite image alogique, amnésique, presque aphasique, tantôt se tenant dans le vide, tantôt frissonnant dans l'ouvert*. L'image n'est pas un objet, mais un « processus». On ne sait pas la puissance de telles images, si simples soient-elles du point de vue de l'objet."
*Le monde et le pantalon, p. 20 (et sur les deux sortes d'images, chez Bram et Geer van Velde, image figée et image frissonnante).
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30/03/2009
Balise 44- Question de rythme (2)
"Le rythme révèle l'espace. Non pas un espace déjà là, constitué en dehors de lui, mais l'espace qu'il ouvre en s'accomplissant et dont la genèse est une avec son apparaître. Un rythme ne se déroule pas dans l'espace. De même que la dimension première du verbe est l'aspect, ce schème de l'image verbale qui apporte et emporte avec soi la tension de durée qui lui est propre, son «temps impliqué» dit Gustave Guillaume, de même un rythme ne s'explique pas dans l'espace (ou le temps) comme fait l'éloignement d'un train qui relève les distances par rapport à celui qui l'écoute dans la nuit. Il n'est pas accessible à une visée intentionnelle, parce qu'il n'est pas de l'ordre de l'objectité. Il n'est objet ni de représentation ni de perception. Il n'est pas : il existe. Il est articulation de l'existence : il articule la spatialité du à..., d'une présence à...
Ce pouvoir du rythme est le fondement de tous les arts."
Henri Maldiney
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19/03/2009
Balise 43-
"La présence qui s'éloigne dégage cette part d'absence qui la garde."
Bernard Noël
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11/03/2009
Balise 42 - la sensation d'une aigrette de vent aux tempes
"J'avoue sans la moindre confusion mon insensibilité profonde en présence des spectacles naturels ou des oeuvres d'art qui d'emblée, ne me procurent pas un trouble physique caractérisé par la sensation d'une aigrette de vent aux tempes susceptible d'entraîner un véritable frisson."
23:41 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie
02/03/2009
Balise 41 - À propos du destin
"Ce sont les hasards qui nous poussent à droite à gauche, et dont nous faisons - car c'est nous qui le tressons comme tel - notre destin.
Nous en faisons notre destin parce que nous en parlons.
Nous croyons que nous disons ce que nous voulons, mais ce qu'ont voulu les autres, plus particulièrement notre famille. Nous sommes parlés, et à cause de cela nous faisons des hasards qui nous poussent quelque chose de tramé, et en effet, il y a une trame .
Nous appelons ça notre destin."
Jacques Lacan
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15/02/2009
Balise 40- Question de rythme (1)-Virginia Woolf
Henri Meschonnic m'ayant donné son accord pour un entretien à paraître dans l'Humanité,j'engrange tout ce qui tourne autour de la question du rythme . Ainsi ces mots de Virginia Woolf:
"La nature du rythme, voilà qui est très profond et va bien au-delà des mots. Un spectacle, une émotion, déclenchent une vague dans l'esprit bien avant qu'ils ne suggèrent les mots qui s'y adapteront. C'est cet élan qu'il faut tenter de saisir quand on écrit, de mettre en mouvement 'et qui n'a apparemment rien à voir avec les mots) et c'est au moment où cette vague déferle et s'écrase dans la tête que naissent les mots qui l'accompagnent."
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14/02/2009
Balise 39 - Mahmoud Darwich: Le palestinien est un être humain!
Je reçois régulièrement la revue de la Fédération des Oeuvres Laïquues de l'Ardèche, la revue Envol . A propos de la mort en août 2008 de Mahmoud Darwich, j'y ai lu ceci, extrait d'un entretien enregistré au Théâtre National Populaire de Lyon le 12/10/07(Traduction d'Elias Sanbar):
"... Honnêtement, je ne sais pas au juste ce qu'est une poésie nationale et je n'aime pas qu'on me désigne ainsi, comme poète national. Je n'ai aucune honte ni de ma nation ni de ma palestinité, mais cette façon de désigner limite mon champ poétique, et à tort, comme si elle conditionnait les lectures de mon oeuvre et ainsi annulait les dimensions multiples du poème. Donc, je suis sorti de ce lieu vers des horizons infiniment plus vastes et j'ai compris que la véritable poésie, la poésie réelle est un voyage entre les cultures, une façon d'ouvrir encore plus largement l'humanité du Palestinien. Parce que le Palestinien n 'est pas uniquement l'objet de la solidarité ou de la pitié ou de la lutte. Le Palestinien ne peut pas être défini uniquement comme l'adversaire de l'Israélien. Parce qu 'il ne faut pas oublier quand même son identité, comme pour n 'importe quel être humain ; son identité humaine précède le conflit. Il n 'est pas né avec le conflit. Donc le Palestinien se pose des questions existentielles, des questions culturelles et la question sur son rapport à la nature, à l'eau, à la vie. Il aime, il déteste et il meurt... c'est un être humain ".
Et que ces mots soient lus comme on regarde des fleurs depuis le toit de l'enfer (Turbulence 27)!
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07/01/2009
Balise 38 - Paul Celan à René Char (1962)
"Voyez-vous, j'ai toujours essayé de vous comprendre, de vous répondre, de serrer votre parole comme on serre une main; et c'était, bien entendu, ma main qui serrait la vôtre, là où elle était sûre de ne pas manquer la rencontre. Pour ce qui, dans votre œuvre, ne s'ouvrait pas - ou pas encore - à ma compréhension, j'ai répondu par le respect et par l'attente : on ne peut jamais prétendre à saisir entièrement - : ce serait l'irrespect devant l'Inconnu qui habite - ou vient habiter - le poète; ce serait oublier que la poésie, cela se respire: oublier que la poésie vous aspire. (Mais ce souffle, ce rythme - d'où nous vient-il ?) La pensée - muette- et c'est encore la parole, organise cette respiration; critique, elle s'agglomère dans les intervalles: elle dis-cerne, elle ne juge pas; elle se décide; elle choisit: elle garde sa sympathie - elle obéit à la sympathie. "
Extrait d'une lettre de Paul Celan à René Char du 22 mars 1962, cité par Andréa Lauterwein, in Paul Celan, édition Belin,
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13/12/2008
Balise 37 - S'entretenir
N'oubliez pas Le quart livre! N'oubliez pas à propos des "paroles gelées" ce que Pantagruel répondit à Panurge: "Donner parolles estoit acte des amoureux"!
19:35 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, poésie
10/12/2008
Balise 36 -
N'oubliez pas ces mots de Al-Mutamar Ibn Al-Farsi, poète soufi de Cordoue (1118-1196):
« Les émissaires qui frappent à ta porte, c’est toi même qui les as appelés et tu ne le sais pas. »
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12/11/2008
Balise 35 -
« Chacun dans sa langue peut exposer des souvenirs, inventer des histoires, énoncer des opinions ; parfois même il acquiert un beau style, qui lui donne les moyens adéquats et font de lui un écrivain apprécié. Mais quand il s'agit de fouiller sous les histoires, de fendre les opinions et d'atteindre aux régions sans mémoires, quand il faut détruire le moi, il ne suffit certes pas d'être un « grand » écrivain, et les moyens doivent rester pour toujours inadéquats, le style devient non-style, la langue laisse échapper une étrangère inconnue, pour qu’on atteigne aux limites du langage et devienne autre chose qu’écrivain, conquérant des visions fragmentées qui passent par les mots d’un poète, les couleurs d’un peintre ou les sons d’un musicien. »
Gilles Deleuze
00:06 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (3)