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12/11/2008

Balise 35 -

« Chacun dans sa langue peut exposer des souvenirs, inventer des histoires, énoncer des opinions ; parfois même il acquiert un beau style, qui lui donne les moyens adéquats et font de lui un écrivain apprécié. Mais quand il s'agit de fouiller sous les histoires, de fendre les opinions et d'atteindre aux régions sans mémoires, quand il faut détruire le moi, il ne suffit certes pas d'être un « grand » écrivain, et les moyens doivent rester pour toujours inadéquats, le style devient non-style, la langue laisse échapper une étrangère inconnue, pour qu’on atteigne aux limites du langage et devienne autre chose qu’écrivain, conquérant des visions fragmentées qui passent par les mots d’un poète, les couleurs d’un peintre ou les sons d’un musicien. »

Gilles Deleuze

00:06 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (3)

Commentaires

Belle citation du grand Gilles !
On regrette de ne pas en trouver ici la référence. (Même si on croit la savoir.)

Cette pensée sur l'écriture est toute proche de ceux que nous aimons et qui nous guident encore dans "ces temps de manque" qui sont les nôtres - et il est vrai aussi que c'est la nature du temps de toujours être temps de détresse même s'il abrite la joie, surtout peut-être lorsqu'il abrite la joie...
Ce sont ceux, comme le dit Deleuze, qui refusent le grand style et cette sorte de littérature-là qui le revendique comme une espèce de décor à la vie. Je pense à Blanchot, Adorno, Celan en particulier.

Et puisque Deleuze inscrit la musique dans sa liste des arts pour lesquels "le style devient non-style", laissant "échapper une étrangère inconnue" - ce qui est si proche du "personne" qui hante l'œuvre de Celan et celle de Rimbaud, et de cette sorte de miracle par lequel la production la plus individuelle aboutit cependant à détruire le "je" et à atteindre l'altérité d'un tout autre que l'on peut aussi nommer, ou "personne", ou "autre", ou encore, en se défiant de la connotation, justement, "humaniste" du terme: "universel"; puisque donc Deleuze associe à sa liste la musique, je voudrais rappeler ici ce si beau texte d'Adorno - qui, juste retour des choses, avait tant influencé Celan, au-delà de leur querelle sur le statut du poème après Auschwitz.
Adorno y parle de la "nouvelle musique".
C'est dans "La musique, la langue et leurs rapports dans la composition actuelle", in Quasi una fantasia, Gallimard, 1982. Et c'est cité dans Adorno/Celan Correspondance, Nous, octobre 2008, et dans la longue préface de Joachim Seng, p. 31 sq.
Voici en résumé:
"La musique bourgeoise avait, jusque dans ses productions les plus hautes, quelque chose d'ornemental; elle se rendait agréable aux hommes par son affirmation des idées humanistes (...) Se faire entendre de façon muette est pour elle [maintenant] la seule forme d'éloquence."
Et encore: "Prière démythifiée, délivrée de la magie de l'effet, la musique représente la tentative humaine, si vaine soit-elle, d'énoncer le Nom lui-même, au lieu de communiquer des significations."

"Santé et fortification!"

Jean-Marie Barnaud

Écrit par : Barnaud | 12/11/2008

Mon ami Hans freibach m'a soufflé, cher Jean-Marie Barnaud, que vous la connaissiez. La voici quand même:
Gilles Deleuze, Bégaya-t-il…in « critique et clinique », ed de minuit, 1993.
Connaissez-vous "la musica callada" de jose Bergamin?
A vous
AF

Écrit par : Alain Freixe | 12/11/2008

Eh non.

Écrit par : Barnaud | 12/11/2008

Les commentaires sont fermés.