04/02/2012
In memoriam Bernard Vargaftig
Quand "la fugacité disparaît"*
La mort, c’était hier, le 27 janvier 2012 à Avignon.
La vie, c’est 1934, la naissance à Nancy puis les terribles années 40, celles des persécutions nazies, années de la peur, de la fuite et du silence. Années de clandestinité où l ‘on apprend aussi à tenir, à se tenir.
La vie en poésie, ce sera en 1965, la soirée du Récamier et dans ce théâtre parisien les paroles d’encouragement de Louis Aragon. Après Chez moi partout publié en 1967 chez PJ Oswald se succèderont une trentaine de livres plus des livres d’artiste avec Olivier Debré, Colette Deblé, Germain Roesz…ainsi que deux remarquables anthologies ; l’une La poésie des romantiques chez Librio, l’autre Poésie de résistance chez J’ai lu. Je ne dirai rien des prix qu’il put recevoir chemin faisant, celui de l’académie Mallarmé en 1991, celui Jean Arp en 2008, je préfère évoquer ici ses deux derniers ouvrages en souhaitant qu’ils donnent envie de retrouver ceux qui se tiennent à l’arrière et notamment cette Suite Fenosa, avec Bernard Noël, publiée chez André Dimanche en 1987.
Le premier est un coffret original liant image et texte, Coffret livre « L’aveu même d’être là »
et DVD « Dans les jardins de mon père », les deux constituants comme une autobiographie poétique de Bernard Vargaftig. Le poète a choisi lui-même les poèmes de son anthologie. Revisitant son œuvre, c’est sa vie qu’il reparcourt. Se promenant dans ses poèmes, il s’arrête ici ou là, comme dans ses souvenirs d’enfant juif caché en Haute-Vienne, près d’Oradour, pendant l’occupation nazie. Ce voyage dans la mémoire n’est pas un simple retour en arrière mais une véritable marche en avant, un véritable travail, une manière de creuser, de pousser plus avant la vie et ce souffle intérieur qui la porte. Cela qui a besoin de toujours plus de mots pour dire ce simple fait stupéfiant « d’être là », traversé de tous les désastres comme de toute lumière. Aveu à répéter dans la différence de ce qui n’en finit pas de commencer toujours à nouveau.
A propos du second, il peut être intéressant de se souvenir de ce qu’Aragon, en 1967, lors de la publication de La véraison chez Gallimard, disait : « j’aime ça, ce langage, haché comme la douleur ». En effet, Ce n’est que l’enfance est un livre que la douleur rythme. C’est elle qui espace les poèmes, les strophes – quatre strophes de quatre vers pour chaque poème – qui va jusqu’à inclure « deux pages blanches et muettes » pour « (dire) la mémoire vivante de (son) fils, Didier Vargaftig ». Devenue rythme, c’est elle qui engendre le temps propre à ce livre. Un temps dont la couleur pudique est celle du « déplacement intérieur » d’un « cri nul désert », le blanc d’un mouvement qui dénude, « faille d’enfance » avant « le dévalement », « accomplissement à nu que le manque / ne rattrape pas » et où c’est l’enfance qui appelle depuis cette distance où elle se tient, ce souffle qu’elle sait creuser toujours à l’avant de nos jours. L’enfance en appelle aux mots non pour combler cette déchirure, la taire par la même occasion mais pour la maintenir, au contraire, aussi vive que ces falaises qui tiennent, face aux vagues aveugles qui les dénudent toujours plus comme cet « ailleurs de moi d’un ailleurs / par la crainte dont la répétition se rapproche / où c’est l’accomplissement qui s’ouvre ».
Aujourd’hui, nous reste son murmure – Il disait : « Je n’écris pas, je marmonne » - sa respiration d’encre, son souffle. C’est là qu’il engagea son être et son existence, son insoumission au monde comme il va charriant toujours plus d’injustice et d’intolérable.
Bernard Vargaftig n’est pas mort. Sa vie s’est accomplie.
* Article paru dans l'Humanité du 02 février 2012
Bernard Vargaftig, Coffret livre « L’aveu même d’être là » et DVD « Dans les jardins de mon père », film de valérie Minetto et Cécile vargaftig, Au diable vauvert, La Laune, BP 72, 30600 Vauvert (39 euros)
Bernard Vargaftig, Ce n’est que l’enfance, Prix de littérature Nathan Katz 2008Arfuyen, Lac Noir, 68370 Orbey ( 11 euros)
08:13 Publié dans Dans les turbulences, Du côté de mes publications | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bernard vargaftig, poésie, alain freixe
18/11/2011
In memoriam Pierre Dumayet
(Dans L'Indépendant de ce jour 18 novembre 2011, Serge Bonnery, Président du Centre Joë Bousquet et son temps rend hommage à Pierre Dumayet. Que publier ici son article soit manière de m'associer au chagrin de son épouse Françoise et à celui de tous ses amis.)
Pierre Dumayet avait épousé l’Aude
Homme de télévision, écrivain, auteur de documentaires consacrés pour la plupart à des peintres et écrivains, Pierre Dumayet s’est éteint hier à l’âge de 88 ans à son domicile parisien.
Il avait été, aux côtés de Pierre Sabbagh et Pierre Desgraupes, le pionnier de l’information télévisée avec la présentation des actualités, ancêtres du journal télévisé et bien sûr l’émission « Cinq colonnes à la Une » qu’il co-dirigeait avec Igor Barrère, un grand classique du petit écran. Défenseur convaincu de la liberté d’expression et de l’indépendance de l’information, il avait fait les frais de son engagement en 1968 – on ne pardonnait déjà pas facilement aux hommes de conviction - mais n’avait pas moins poursuivi une trajectoire personnelle originale.
Homme de culture, Pierre Dumayet était un amoureux de l’art et des lettres. Les plus anciens d’entre nous se souviennent de « Lectures pour tous », cette émission littéraire qui fut en quelque sorte l’ancêtre d’Apostrophes. Sur le plateau, Pierre Dumayet reçut quelques pointures de la littérature de son temps : Marguerite Duras par exemple, et le toujours très controversé Louis-Ferdinand Céline dont l’entretien fut, lui aussi, un moment exceptionnel de télévision.
Outre ces activités, Pierre Dumayet a aussi écrit de nombreux films pour la télévision, sur des artistes qu’il aimait. Citons son ami le peintre Pierre Alechinsky dont il dévoila l’atelier au grand public, le poète Pierre Reverdy (né à Narbonne) dont le film co-signé avec le réalisateur Robert Bober a encore été projeté la semaine dernière lors du Banquet du Livre d’automne à Lagrasse, et enfin les écrivains Marcel Proust et Gustave Flaubert. Tous ces documentaires avaient été diffusés dans le cadre de l’émission de Bernard Rapp, « un siècle d’écrivains ».
« La vie est un village »
Et puis tout près de nous, plus près en tout cas que de Paris où il vécut une immense carrière de journaliste et d’homme de télévision, Pierre Dumayet avait épousé l’Aude. Avec Françoise, son épouse artiste peintre, ils avaient acquis une maison à Bages, dominant l’étang éponyme qu’il contemplait toujours avec bonheur pendant les longs mois de printemps et d’été où il s’installait « à la campagne », comme il disait. « La mer qui est loin derrière la mer que je vois ne doit pas être belle à voir. Si j’étais un bateau, je pourrais décrire la tempête, mais je suis assis à ma table et je n’ai peur de rien… » (1) Ainsi décrivait-il ce qu’il voyait de sa fenêtre, à Bages où il goûtait à la sérénité des paysages et où, à ses heures, il était lecteur de L’Indépendant qu’il épluchait avec une tendresse particulière pour les chroniques des villages dont il restituait la saveur lors de lectures partagées.
Pierre Dumayet avait tissé des liens forts avec la région. A Perpignan, il comptait quelques amis fidèles parmi lesquels la galeriste Thérèse Roussel qui avait consacré dernièrement une exposition aux travaux de son épouse Françoise. Dans l’Aude, il était devenu un proche du Centre Joë Bousquet pour lequel il donna de son temps en se révélant un soutien sûr dans l’organisation de bon nombre d’expositions et de rencontres consacrées à la littérature et aux arts plastiques.
Enfin, il était le compagnon de route du Banquet du Livre de Lagrasse et des éditions Verdier où il a publié pas moins de cinq romans. Car Pierre Dumayet, qui avait tant fréquenté les auteurs et les livres, était aussi un authentique écrivain, pas un écrivain « à temps perdu » mais l’homme d’une langue lumineuse par son élégance et pétillante d’intelligence. Une langue accueillante et radieuse.
Pierre Dumayet était un écrivain du soleil, de la sieste railleuse et de l’apéritif rieur : sa vie à Bages était un village, pour paraphraser le titre d’un de ses livres, et sa disparition laisse ses amis audois et catalans dans la peine, eux qui le voyaient comme un roc indestructible.
Alors puisqu’il parlait si bien, si juste, laissons à Pierre Dumayet le mot de la fin avec cette évocation nonchalantede la mort incongrue : « Dans une centaine d’années, je ne me souviendrai plus de la couleur de ma voiture. J’aurai perdu ma mémoire en même temps que le reste. Mon nom ne sera plus le mien. A ma place il n’y aura personne… ».
Serge Bonnery
(not) (1) Les citations sont extraites de « Brossard et moi » et « La nonchalance », romans publiés aux éditions Verdier. Pierre Dumayet est également l’auteur de « La maison vide », « Le parloir », « La vie est un village » (Verdier) et « Autobiographie d’un lecteur » (Pauvert et Le Livre de Poche).
18:46 Publié dans Dans les turbulences, Mes ami(e)s, mes invité(e)s | Lien permanent | Commentaires (1)
01/11/2011
Turbulence 47 - C'était en 1883...et aujourd'hui?
« En lisant cela, les banquiers qui savent bien que République ou Monarchie se valent pour eux tant qu’on ne laissera pas le socialisme se mettre à leurs trousses, les banquiers ont plaqué comme un verre de monocle , un louis d’or contre leur œil et ont lorgné par ce carreau, le mourant et le ministre, pouffant de rire, pris de pitié pour ces marionnettes dont leurs mains crochues tiennent les fils »
Jules Vallès, Le tableau de Paris, écrit en 1883
21:36 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (0)
28/01/2011
Turbulence 46 - Indignez-vous!
On s'en posait des questions tous ces temps où nous avons pu prendre la rue: manifester peut-il déboucher sur un mouvement collectif de plus grande ampleur, une levée en masse du peuple? La réponse vient de Tunisie. Mais il fallut payer le prix du sang et des larmes!
22:24 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (0)
02/01/2011
Turbulence 45 - Le temps des liquidateurs (bis)!
« Les liquidateurs sont toujours à l'oeuvre! Après la suppression de la direction du livre et de la culture (voir Turbulence 39 ) voilà que le Monastère de Saorge changerait de vocation: un hôtel! De luxe, on imagine! Ceux -la qui disent avoir le souci des créateurs sont prêts à brader x lieux dont le Monastère de Saorge au tourisme - "culturel" bien évidemment!!! »
Vous vous souvenez ? C’était dans ma turbulence 44 du 04/02/2010.
Elle s’intitulait « le temps des liquidateurs » !
Eh bien, un an après, ils sont toujours à l’œuvre les démolisseurs d’âme !
À Saorge, le 3 décembre 2010, Jean-Jacques Boin voit le contrat annuel qui le liait au Centre des Monuments Nationaux non renouvelé. Depuis 9 ans, ce haut lieu culturel a résonné de tant de voix d’écrivains en résidence, de concerts, d’exposition…va-t-il retourner au silence ? Pour combien de temps et avec quelles perspectives ?
À Lyon, La scène poétique dont le poète Patrick Dubost s’est occupé de 2003 à 2010 à la Bibliothèque Municipale de la Part-Dieu vient de fermer son rideau. Plus d’une centaine de poètes français et étrangers sont venus risquer leur voix sur cette scène. Parmi les derniers, Bernard Noël et Charles Juliet. C’était le 15 décembre 2010. C’était la dernière séance. Patrick Dubost apprenait sans autre forme de procès la suppression du cycle 2011 sur décision unilatérale et sans discussion du nouveau directeur de la Bibliothèque !
À Grasse, c’est La Poésie a un visage qui passe à la trappe après 12 années d’existence. La Poésie a un visage c’était un partenariat entre la ville de Grasse, l’éducation nationale, la Drac, le Printemps des poètes, l’association Podio, Radio-Agora FM, le théâtre de Grasse, le Festival TransMéditerranée et tant d’autres. C’était durant tout le mois de mars des lectures publiques à la Bibliothèque Municipale puis à la Maison de la Poésie (créée en 2006), des rencontres (établissements scolaires, environ 45 classes pour une quinzaine de poètes ; Maison d’arrêt…) des prises de parole sur RadioAgora FM ; une déambulation poétique en vieille ville ; des préfaces poétiques au théâtre de Grasse ; des conférences… Par manque de volonté politique et pour de mauvaises raisons économiques et de fonctionnement propres à la ville de Grasse et à la Bibliothèque Municipale, la Poésie n’a plus de visage à Grasse !
Certes, bien intentionné, le conservateur actuel entend transférer la défunte manifestation à la communauté d’agglomération faisant miroiter une plus grande audience. De ce qui n’existe pas, je ne puis juger mais à voir le fonctionnement de la Maison de la Poésie cette année, sa programmation chaotique, l’arrêt du partenariat avec l’association Podio qui depuis plus de 25 ans travaille bénévolement pour assurer au fonds Vendel de poésie contemporaine – 30000 volumes sont en dépôt à Grasse ! – un rayonnement toujours plus grand, les doutes l’emportent ! Là où il fallait consolider, on mets à bas !
À paris, la Maison des écrivains (Mel) voit son budget menacé par l’annonce du gel de 5% du budget du Ministère de la culture. Elle devrait alors si cela se confirme renoncer à une partie conséquente de ses activités.
Ce ne sont là que quelques signes, j’y verrais quant à moi des symptômes !
Littérature, Poésie, Musique, Arts, Théâtre…cela fait lurette maintenant que la culture passe un mauvais quart d’heure ! La France avec !
La République sans la culture, c’est la nuit. La mauvaise nuit où attendent les monstres !
18:16 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : saorge, scène poétique, la poésie a un visage, la mel, la culture, les liquidateurs
04/02/2010
Turbulence 44 - Le temps des liquidateurs!
Les liquidateurs sont toujours à l'oeuvre! Après la suppression de la direction du livre et de la culture (voir Turbulence 39 ) voilà que le Monastère de Saorge changerait de vocation: un hôtel! De luxe, on imagine! Ceux -la qui disent avoir le souci des créateurs sont prêts à brader x lieux dont le Monastère de Saorge au tourisme - "culturel" bien évidemment!!!
Je relaie de toute mon énergie mes ami(e)s Michaël Glück et Hélène Sanguinetti qui viennent de m'informer de ces menaces.Faites savoir tout cela autour de vous! Signez la pétition! Faisons-nous entendre! Ici, ailleurs. Partout!
22:53 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : littérature, poésie
29/01/2010
Turbulence 43 - Haïti
En pensant à Haïti, aux haïtiens et tout particulièrement aux enfants,
En pensant à la simplicité meurtrière de la nature, à sa "force qui va", ni bienveillante, ni hostile... ces quelques lignes de Marguerite Duras:
"Tout est devenu BLEU.
C'est bleu.
C'est à crier tellement c'est bleu. C'est du bleu venu des origines de la Terre, d'un cobalt inconnu. On ne peut pas arrêter ce bleu, ces traînées de poussières bleues des cimetières des enfants.
On souffre. On pleure. Tout le monde pleure.
Mais le bleu reste là. Acharné.
Le bleu des enfants comme celui d'un ciel."
15:12 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, haïti
31/12/2009
Turbulence 42 - 2010!
Aux ami(e)s, aux passant(e)s du blog, tous mes voeux de belle énergie pour affronter la dureté des temps! Debout, sur les barricades mystérieuses de la poésie et de ses entours!
16:33 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : littérature, poésie
Turbulence 41 - André Pieyre de Mandiargues et Yannis Ritsos, centenaires!
Je reçois ce jour, 28 décembre 2009, les deux forts volumes des oeuvres poétiques complètes d'André Pieyre de Mandiargues, Ecriture ineffable précédé de Ruisseau des solitudes de L'Ivre Oeil et suivi de Gris de perle (N°454, 9,90 euros) ; L'âge de craie suivi de Dans les années sordides, Astyanax et Le point où j'en suis (N°455, 9, 90 euros), en Poésie/Gallimard. Depuis un an au moins, je tournais autour de André Pieyre de Mandiargues, du centenaire de sa naissance que personne ne saluait ou si peu. Et commei ces 2 tomes de celui qui aux côtés des romans, récits, nouvelles, pièces de théâtre et essais tenait la poésie pour la "forme suprême" que pouvait prendre "la littérature" sont les bienvenus! Bienvenus pour saluer celui qui avait "pris la robe de l'ordre des insatisfaits": "vouloir peindre et écrire l'impossible". Sûr qu'on y reviendra au cours du Printemps des poètes 2010 à propos de "couleur femme"!
*
Comme je tournais autour de Yannis Ritsos. Ritsos qui écrivait un "(...) J'insiste; je ne rends pas les armes" que tôt j'avais fait mien. Je saisis cette occasion pour signaler les deux volumes parus chez Ypsilon éditeur: Temps pierreux, Makronissiotiques, poèmes écrit lors de sa première déportation et Pierres, répétitions, grilles, édition intégrale que Gallimard avait publié de manière partielle en 1971; ainsi que le blog de Jacques Ancet (http://jancet.canalblog.com)dans lequel vous pourrez trouver l'article qu'il a consacré sous le titre de L'Inépuisable au poète grec, en 2007.
Que ce soit là mon salut à ces deux poètes! Mon salut comme une invite à les lire!
15:46 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, poésie, mandiargues, ritsos
03/12/2009
Turbulence 40 - Prenons soin de nos moulins!
Je relaie bien volontiers et m'associe à ce message de mon ami peintre et graveur, Henri Baviera:
"Pour ceux qui ne le savent pas, les Moulins de la Larroque viennent de subir le plus gros outrage, après des années de travail, c’est à dire une mise en liquidation judiciaire, ceci après avoir perdu l’un des deux entièrement dans un incendie.
Je suis artiste peintre et graveur, client des moulins depuis une vingtaine d’années pour la qualité particulière de ses papiers entièrement fait à la main. Au cours de ces années il est entré dans l’édition de mes gravures par centaine de kilos. Une grande partie de ma production en dépend comme c’est le cas de nombreux de mes collègues. Ses papiers sont connus et appréciés dans le monde entier. Si vous êtes artiste c’est peut-être aussi votre cas.
Aujourd’hui le moulin est en danger d’expropriation par des gens qui ont profit et intérêt à le mettre en faillite et à se l’approprier.
Si cette pratique est hélas, d’un usage courant à notre époque, le cas présent mérite une attention particulière.
Il s’agit de défendre un patrimoine culturel de la plus grande importance, non seulement parce que celui-ci date de 1497, mais parce qu’aujourd’hui il demeure un pôle de savoir faire et de traditions qui sont en danger de disparition si l’on n’y prend garde.
Je veux attirer l’attention de tous les défenseurs de la culture, des artistes, des élus, des pouvoirs publics, des médias, sur ce drame scandaleux qui se déroule sous nos yeux.
Il est encore temps d’agir, pour sauver le moulin de cet acharnement aveugle et destructeur.
Il faut savoir que sans le papier nous en serions encore à écrire sur des peaux de bête et l’imprimerie n’aurait pu exister et à sa suite ni la culture et le savoir d ‘aujourd’hui.
Un moulin à papier n’est pas un bâtiment comme les autres, actuellement il n’en existe plus que trois ou quatre en France, il ne faut pas les laisser disparaître !!
D’une part pour la valeur patrimoniale qu’ils représentent, mais aussi comme fournisseurs incontournables des artistes, graveurs et éditeurs d’art, qui à leur tour subissent un grave préjudice si ces papiers disparaissent.
Pour terminer il y a lieu de dénoncer le niveau moral déplorable et l’extrême cruauté qui s’exercent au dépends de la famille Duchène exploitante des moulins depuis 1972 qui n'ont jamais compté leurs efforts depuis cette date.
Cette situation devrait faire l’objet d’une pétition au niveau national, d’une note au ministre de la Culture et à la Défense du Patrimoine.
Par cette lettre j’apporte personnellement tout mon soutien de citoyen à Monsieur et Madame Sanchez ainsi qu’à la famille Duchène .
J’invite tous les amis de la culture et des arts, à manifester leur soutien, en donnant leurs idées et à faire suivre ce message autour de vous.
Si vous êtes d'accord pour donner votre soutien il suffit de renvoyer cette lettre (en copier-coller)
en mettant vos commentaires et votre nom à la fin à
Fabienne et Louis Sanchez
moulindelarroque@free.fr"
09:25 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, papier, moulinsq de larroque
19/11/2009
Turbulence 39 - Vous avez dit livre? Encore?
Un ministre, ça signe! ça termine les boulots commencés. Hier, Hadopi. Aujourd'hui, la direction du livre et de la culture. Supprimée. Par décret. C'était dans l'air! Abattu, le mauvais oiseau!
Nous protégeons la création, ils ont dit ça, non? Nous avons le souci des créateurs, ils ont dit ça, non? Aussi ça, non? Quand ils parlent d'artistes et de culture, c'est d'"industrie culturelle" -voir Adorno et Horkheimer - qu'ils parlent et de tout ce qui va avec de l'uniformisation des modes de vie aux profits!
Hadopi, c'était cela! Aujourd'hui, c'est la direction du livre et de la culture qui est supprimée. Après quid du CNL, de sa commission qui attribue aides aux éditeurs et bourses aux auteurs? Et pourquoi pas la loi sur le prix unique du livre...J'en passe en attendant des meilleures, par exemple l'action éducative via les DRAC...
Voyez Survivance des Lucioles de Georges Didi-Huberman (ed de Minuit): Ils veulent la luce, la lumière du pouvoir, que tout soit clair, enfin! Que l'on baillonne ceux qui pensent dans les mots. À la réserve! Que disparaisent les lucciola, leurs lueurs intermittentes, erratiques, mineures, menues, petites, lueurs de résistance. Plein feu et qu'on en finissent avec tous ces contre-feux, ils disent, ils veulent ça! Détruire les lucioles et leurs signaux désirants, amoureux dont l'enjeu n'est rien de moins que de l'humain en formation, ils veulent ça!
Les lucioles ne disparaîtront pas! Beaucoup mourront. Meurent déjà. Mais faire un pas de côté, c'est se jeter dans le "présent de leur survivance", c'est les "voir danser vivantes au coeur de la nuit, cette nuit fût-elle balayée par quelques féroces projecteurs".
18:47 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : littérature, poésie, livre
16/11/2009
Turbulence 38- Henri Michaux et le style
À méditer par tous ceux qui croient que "le style, c'est l'homme" et par nous autres qui sommes engagés sur les chemins de l'écriture, cet extrait de Poteaux d'angle d'Henri Michaux:
"Le style, cette commodité à se camper et à camper le monde, serait l’homme? Cette suspecte acquisition dont, à l’écrivain qui se réjouit, on fait compliment? Son prétendu don va coller à lui, le sclérosant sourdement. Style : signe (mauvais) de la distance inchangée (mais qui eût pu, eût dû changer), la distance où à tort il demeure et se maintient vis-à-vis de son être et des choses et des personnes. Bloqué! Il s’était précipité dans son style (ou l’avait cherché laborieusement). Pour une vie d’emprunt, il a lâché sa totalité, sa possibilité de changement, de mutation. Pas de quoi être fier. Style qui deviendra manque de courage, manque d’ouverture, de réouverture : en somme une infirmité.
Tâche d’en sortir. Va suffisamment loin en toi pour que ton style ne puisse plus suivre."
19:32 Publié dans Dans les turbulences | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, style, michaux