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19/03/2009

Patricia Cottron-Daubigné - Le corps dans le regard

( Patricia Cottron-Daubigné est née à Surgères en Charente-Maritime, elle vit et travaille aux abords du Marais Poitevin.photopatricia.jpg
Elle a publié des poèmes dans de nombreuses revues telles que Décharge, Friches, Poésie première, Triages, Contre-allées…

Plusieurs recueils ont été édités depuis Portraits pour ma mémoire en 1996 chez Soc et Foc (prix littéraire de la Région Pays de Loire) jusqu’à Elle, grenat noir au Dé bleu (2002), et plus récemment Journal du houx vert et de la bruyère aux éditions Gros textes (2005) et Des paniers de fruits dorés, comme aux éditions Tarabuste (anthologie 2006)...Elle vient de faire paraître Une manière d'aile aux imagemanieredaile.jpgéditions Soc et foc)

 

 

 

 

 

Le corps dans le regard


I


Le  corps est entré dans le cri
le visage aussi
depuis longtemps
elle cherche des mots
vivre si mal dans
le mot rouge par exemple
que faire avec
la couleur celle des fleurs
qui versent la lumière
ça pourrait ressembler à une
prière la lumière les fleurs
rouge pourtant le mot
c’est du cri dans la bouche
rouge mon amour .


II

Lui dans la voix qu’elle entend
de l’homme et le premier regard
le paysage qu’il est
la couleur rouge qui palpite
bordée de larmes
ils savent
les mots
dévorés de chair


III


le cri ne traverse pas le silence
se tient là
dans la chair                
jusqu’au bout des ongles
dans les doigts parfois
on pourrait l’entendre
derrière la nuque aussi
quelque chose même dans les épaules
je vous offre amour
ce  cri
celui que personne
jamais ne prend
enfoui loin            

autre que les grands remuements de plaisir là où il s’étale et s’étend s’enroule à l’espace
le cri que vous prenez toujours si beau et que j’aime dans vos vastes paumes et le monde éclaté de votre sexe
à perdre le contour de soi
qui s’enroule au vôtre dans des appareillages de jambes qu’on ne sait  plus qui
quand plus rauques nos gorges
iraient au bout presque

je vous offre l’autre
noir
le cri ailleurs
l’envers
celui des jours ajoutés aux jours
que même à aimer on n’entend pas
je vous offre cela
comme une tête sur un plateau
en plus du corps
qui est.                                                               


IV


A Lahore, à Calcutta vous souvenez-vous elle crie la mendiante
comme lui l’homme de Lahore
au bord des grilles
le cri hurle dans la ville
l’impossible à entendre
des fous sans doute


et l’épaule nue d’Anne-Marie Stretter
et vous dans la sensation de l’épaule
nue
j’ai tout  oublié
hors le cri sous ma peau
le même
vous souvenez-vous


Au bord des grilles du parc au   bord des lumières l’homme et la mendiante la fille des rives du Gange regardent
on danse là-bas les corps s’exaspèrent
au bord des grilles dressé d’effroi l’homme hurle
le cri hurle dans le crâne dans la bouche




avec le corps dans le regard
l’épaule est nue
Anne-Marie Stretter moi qui d’autre entend     
au-dedans quelque chose se tient
fracassé dans le désir



la mendiante crie depuis longtemps   
elle crie sa faim
et l’homme aussi
qui regarde
ne parlent pas depuis longtemps




la robe noire montre le sein
c’est lui que l’on voit
la pointe tendue sous la robe noire
et la moiteur de la peau
la respiration humide du désir
sur l’épaule nue




Dans Calcutta si mal parfumée il fait chaud vous souvenez-vous une fleur qui pourrit




quelqu’un a dit une fleur qui pourrit
un nénuphar dans le corps
des brisures de verre peut-être aussi
qui entend
le cri monte
de ce qui brûle
dedans
le cri dévore dedans
une fleur qui pourrit
vous souvenez-vous



Un piano joue l’exaspération  de tout
ne bercera pas le cri
ni vos mains longues et vastes rien




vous souvenez-vous  l’épaule nue d’Anne-Marie Stretter
le cri
il n’y avait pas de mots
personne n’a compris
j’ai posé mes larmes dans les vôtres
amour
vous souvenez-vous
la chanson de l’Inde
son parfum   



maintenant la mendiante a cessé son cri
elle chante
elle chante aigu si aigu

dans la ville
une langue qu’on ne connaît pas
elle est folle dit-on
comme l’homme.

© Patricia Cottron-Daubigné

Commentaires

Merci, Alain, d'avoir diffusé ce très beau poème.
Comme dit James Sacré : "Quel cri silencieux brise la forme du vent ? »

Écrit par : François Laur | 19/03/2009

Merci à toi d'être toujours aussi attentif. Allez-vous bien du côté de Carcassonne?

Écrit par : Alain Freixe | 19/03/2009

Quelle agréable avancée pour ajouter des commentaires! D'ailleurs, comment pourrions-nous communiquer?

Écrit par : Noémie | 15/06/2012

Les commentaires sont fermés.