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01/07/2008

René Daumal aurait cent ans

 "La porte de l'invisible doit être visible." René Daumal

 

Né le 16 mars 1908 à Boulzicourt dans ce pays des Ardennes, on lui doit ce clin d'oeil à Arthur Rimbaud : "Oui, nous sommes tous de la race d'Antée, et pour mon compte, je dépérirais vite si je n'allais chaque semaine piétiner, palper et souvent fouiller, râcler, retourner le ventre maternel. Paysan!" ( le 29/07/1932 à Rolland de Renéville).

Avant Le mont analogue - cette ascension inachevée d'un sommet inaccessible", ce voyage vers la Réalité, vers la "vraie vie" - on relira La vgrande beuverie - cette satire du monde des "hommes-creux", critique féroce des postures et des impostures de ses contemporains; on s'efforcera de prendre la mesure des efforts par lesquels, dans cette expérience qu'est la poésie, le poète René 494dfbb61a7eac9f702992c5bef0d959.jpgDaumal essaya d'être un "poète blanc", s'arrachant aux rivages où il fut "poète noir", tout en reconnaissant que "de fait, toute poésie humaine est mêlée de blanc et de noir" : mais l'une tend vers le blanc, l'autre vers le noir" (cf. Poésie noire et poésie blanche in Le contre-ciel, Poésie/Gallimard); on visitera cette période des années adolescentes (1926-1932) qui le verra en compagnie de Roger-Gilbert Lecomte, Roger Vailland et quelques autres "phrères simplistes" tels que Pierre Minet du lycée de Reims créer le groupe - se joindront alors à eux à Paris Hendrik Cramer, Artur Harfaux, Maurice Henry, André Rolland de Renéville, Josef Sima...- et la revue Le grand jeu - 3 numéros entre 1928 et 1930 - et débattre avec son aîné André Breton et le groupe surréaliste.

Que cet anniversaire soit l'occasion de redonner à lire le René Daumal de Joë Bousquet qui, à Carcassonne, créa en 1928 la revue Chantiers laquelle accueillera, malgré son ancrage dans le surréalisme via Paul Eluard, quelques membres du Granjeu comme André Delons, josef Sima...Cet ouvrage que vous trouverez au catalogue des éditions Unes comprend outre la fin de Traduit du silence - Attention! Non le texte que Jean Paulhan tirera en 1941 des quelques mille pages qu'il emportera de la chambre de Carcassonne mais celui publié en date du 20 mai 1939 et constituant le N°65 des Cahiers du journal des poètes - ; un hommage paru dans le N°272 des Cahiers du sud et enfin une lettre inédite du 2 juin 1932 de Bousquet à Jean Ballard, directeur des Cahiers du sud; le tout mis en situation par Bernard Noël dont je relèverai l'affirmation selon laquelle finalement il importe peu que le temps n'ait rendu justice ni  au Grand Jeu, ni à Bousquet "car c'est la mort qui fixe et statufie: nous, les vivants, ne savons jamais ce qu'elle mettra à notre place pour déguiser l'absence. Le Grand Jeu n'est pas plus un sous-groupe surréaliste que Bousquet n'est "un" écrivain, lui qui cache sous son nom tout un mouvement anonyme, dont les voix multiples n'en finissent pas de troubler l'eau du regard trop chargée de présence et n'en finissent pas non plus de faire fleurir des visages au bord de l'amour devenu, par lui, énergie de la langue." On ne saurait mieux dire. Ces hommes se tiennent comme des rôdeurs, en bordure des routes, adossés aux fossés, les yeux perdus dans "les confins de la lumière et de la nuit impénétrable", là où le regard se traverse de son propre coeur.

Ce que Bousquet dit de Daumal, je le dirais des deux, et volontiers des trois - Bernard Noël compris! -: n'en perdons aucun de vue, la vertu de poésie est intacte chez eux! C'est qu'avec Bousquet, ils considèrent comme une véritable et redoutable entreprise le fait de ne plus séparer vie artistique et vie morale, de ne plus admettre comme oeuvre littéraire digne de ce nom, c'est-à-dire capable de faire oeuvre de vie, et non de donner du rêve à consommer aux anesthésiés que nous sommes, que celles où la personne morale se trouve engagée. 

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