29/12/2013
Michel Ménaché a lu Dix-huit petites chansons de la patrie amère* de Yannis Ritsos, éditions Bruno Doucey, 11 euros
Sous le titre Yannis Ritsos, poète-contrebandier, Bruno Doucey salue et éclaire la poésie de combat de l’auteur dans son pays opprimé, persécuté par les dictatures à répétition. Il la situe aussi en regard du contexte international des bouleversements tragiques des années 70 : « partout dans le monde, ou presque, les poètes sont au corps à corps avec l’Histoire. »
Mikis Theodorakis, en exil à Paris, après le nouveau coup d’Etat militaire du 25 novembre 1973, souhaite mettre en musique des poèmes de son ami Ritsos détenu à Léros. Le choix du poète alerté clandestinement se porte vers les Dix-huit petites chansons de la patrie amère. Ce sont des distiques de 15 syllabes qui composent ces 18 strophes de 4 vers. 16 d’entre elles étaient déjà écrites depuis le 16 septembre 1968, jour de leur composition par le poète en résidence surveillée à Léros. Reprises et remaniées en 1973, elles se lisent comme un unique poème de résistance, - s’inspirant de la tradition populaire (dite démotique). Le poète destine l’œuvre à être chantée sur la musique de Theodorakis à qui elle est dédiée.
La tradition démotique remonte aux chants et poèmes « de contrebande » des klephtes des montagnes grecques qui s’opposaient à la domination turque. Faire renaître la fierté d’un peuple contre ses tyrans en uniforme en se référant aux héros du passé a souvent inspiré les poètes de différents pays en lutte… Bruno Doucey y fait écho en établissant un parallèle brutal entre deux dates significatives :
«1973, les tanks – 2013, les banques. »
Il nous rappelle aussi que « les corrélations qui unissent le serpent de mer du fascisme aux crises économiques » sont évidentes… Et il conclut : « La poésie de Yannis Ritsos vous invite à prendre le maquis de la pensée. »
Le rapport entre passé et présent s’inscrit dans la transparence du poème :
« Vont les klephtes boire en secret et le gosier se gonfle
tel le moineau, et ils glorifient la pauvre mère Grèce.
La chaleur et la force du legs de Ritsos vibrent encore dans ses mots, invitent à prendre le maquis de la pensée » :
« Ne pleure pas sur la Grèce, quand elle est près de fléchir
Avec le couteau sur l’os, avec la laisse sur la nuque,
La voici qui déferle à nouveau, s’affermit et se déchaîne
Pour terrasser la bête avec la lance du soleil. »
* Une première version bilingue des Dix-huit petites chansons de la patrie amère a été publiée en 1992 par Fédérop éditions
(article paru dans la revue Europe n° 1007 mars 2013)
18:58 Publié dans Mes ami(e)s, mes invité(e)s | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ménaché, yannis ritsos, revue europe
Commentaires
Il est dommage qu'il manque dans cet article le nom de la personne qui a choisi ces textes, les a aimés, les a portés et les traduits. Il s'agit d'Anne Personnaz, magnifique traductrice de Rítsos. Comment avoir pu oublier de citer la traductrice !!
Écrit par : Isabelle LAGNY | 02/01/2014
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