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28/11/2025

Rencontre / Lecture avec Alain Freixe le samedi 6 décembre à 19h, librairie Victor et Madeleine, Canet-en-Roussillon

rencontre expo 061225.pngSamedi 6 décembre à 19h00 rencontre avec Alain Freixe sous le regard des œuvres exposées de Joseph Maureso et Patrick Soladie à qui il rendra hommage sous le plus haut regard de Jacques Quéralt, passeur et accompagnateur.

Lecture d’œuvres croisées aux hésitantes frontières entre texte et image des Cahiers du Museur d’Alain Freixe avec Patrick Soladie et Joseph Maureso et d’Evelyne Maureso avec Claude Massé.

Présentation et lecture du dernier livre d’Alain Freixe publié aux éditions de la Margeride accompagné d’encres de Robert Lobet, Dans ce plus de jour qui fait le jour.

Patrick Soladie et Joseph Maureso, ces deux artistes et amis ont exposé ensemble à la Casa Carrere de Bages (66) en 2009.

Aujourd'hui en décembre 2025, c'est le poète et ami Alain Freixe qui les réunit à nouveau à la librairie-galerie Victor & Madeleine, pour participer à une poétique d'espace partagée entre les mots et les figures.

Deux langages plastiques différents aux frontières poreuses et qui accueillent chacune et chacun à l'aune de sa culture et de son histoire.

Ils ont en commun un rapport éthique à leur pratique picturale, avec lequel ils ne transigent pas !

Exposition visible jusqu’au 4 janvier 2026


Débat et pot de l’amitié suivront

* Places limitées, réservation conseillée

Lu 124- Thierry Metz, Lettres à la Bien- aimée et autres poèmes, Poésie / Gallimard, juillet 2025, cat 3

Thierry Metz, son chemin dans l’inépuisable

 71+zFAlbj-L._AC_UL640_QL65_ copie.jpgIl faut saluer – et je le fais avec enthousiasme – la parution dans la collection Poésie / Gallimard de ces Lettres à la Bien-aimée et autres poèmes de Thierry Metz même si je regrette que le prix Froissart de1989 Dolmen et L’homme qui penche de 1990 n’y figurent pas.

Les poèmes de Thierry Metz y sont encadrés d’une importante, précise et rigoureuse préface d’Isabelle Levesque qui s’attache à replacer chacune des œuvres dans son contexte de création et d’une postface d’Eric Vuillard dans laquelle il se montre sensible à l’écriture même de Thierry Metz qui se développe « dans le déchirement du langage et des choses, sur la feuille percée de mots ».

Thierry Metz était maçon, manœuvre - il faut lire le magnifique Journal d’un manœuvre paru chez Gallimard, collection L’Arpenteur, en 1990, qui connut un beau succès de librairie - Oui, il avait choisi d’être maçon parce qu’il y avait là le travail des mains certes mais aussi parce qu’on y apprend que « les murs du livre et de la maison sont percés d’ouverture » et que cela « permet d’y revenir ».

Mais il était déjà tard pour lui puisque, en mai 1988, la mort avait ravi son jeune fils Vincent par l’entremise d’une automobile qui faucha l’enfant en bordure de route.

Il est des voix dont on ne se remet pas de celles qui certains soirs nous rendent visite, celle de l’enfant qui « nous raconte ce qui se passe là-bas, comment sont les gens, ce qu’on y trouve…Ces voix nous ferment les yeux ». Et parfois « Non / Rien de cela / Qu’une inépuisable, inexorable absence / Rien qu’une mort.// Et un nom : Vincent. »

« Quelle absence que d’écrire », écrit Thierry Metz. Cette traque de l’absence dans « la langue / qui chemine dans l’inépuisable », cet affrontement à la question de savoir comment donner présence et voix de rouge-gorge à ce « quelque chose d’incertain / d’indicible / qui ne s’éteint jamais » dura neuf longues années coupées de publications et de deux séjours volontaires en hôpital psychiatrique avant de céder à la ramasseuse de sarments et d’en finir un 16 avril 1997, à 40 ans.  

Neuf longues années pendant lesquelles il  fut à la manœuvre. Je voudrais rappeler que ce mot renvoie à la manière dont les couleurs d’un tableau sont fondues et agencées. Ici dans les mots.

Mais attention pour Thierry Metz ces mots doivent être écriture sinon, ils ne sont pas parlant, selon lui. Et parlant, ils ne le sont jamais assez. Toujours, ils séparent, nous laissent dehors, au bord – et même si l’on retourne et retourne la langue – de ce qui serait à dire. Ainsi le poème est-il pour lui « un abri de mots / mais pas longtemps », note-t-il. L’absence revient. La poésie circule entre les mots qui portent le drame d’être au monde. C’est par là qu’elle nous touche. On y sent la vie respirer de souffle en souffle. A la Bien-aimée, il écrira : « J’ai vidé la page pour que tu puisses entrer ». C’est ce souci de l’autre qui émeut. Cette volonté d’une écriture qui va seule, avançant au travers d’une vie qui va se dépouillant. Sa parole n’est pas parole de « prince », parole pleine, remplie jusqu’au débord, « sourde de se suffire à elle-même » mais bien parole de « gueux », selon la belle distinction opérée par Christian Bobin, que trouent vide et silence. Assez pour laisser place à nous autres lecteurs, pour partager l’impartageable !

( Paru dans le Patriote Côte d'Azur, semaine du 20-26 novembre 2025)

 

Lu 123 - Thierry Renard, Oeuvres poétiques Tome II, collection La Bibliothèque, La rumeur libre, 2018

oeuvres_poetiques_tome_2_renard_thierry_cover.jpg Il y a deux ans, en avril 2016, c’était le tome I des Œuvres poétiques de Thierry Renard, voici maintenant le deuxième. Plus d’un millier de pages, la reprise de 7 recueils dans le Tome I et 14 dans le Tome II plus un inédit qui clôt le volume. J’observe que cet inédit a pour titre Le fait noir/deux qui fait écho au Fait noir, préfacé par Patrick Laupin qui ouvrait le Tome I, comme si 25 ans après le poème avait toujours et encore à témoigner du « passage inexplicable de la vie», son épreuve, ses rencontres, ombres et éclairs mêlés.

Deux tomes, c’est une somme ! Son ami Emmanuel Merle disait c’est une « cathédrale laïque » en pensant aux mots de Pierre-Albert Jourdan qui à propos d’un « amandier en fleurs tout bourdonnant d’abeilles » avait écrit : « c’est une cathédrale » ! Ce serait aussi comme un manteau de mots, un manteau de nuit troué de lucioles, traversé de quelques nocturnes « qui (traceraient) la chance d’un autre jour » selon les mots de Michel de Certeau.

La poésie est de l’ordre de ce combat, de cette guerre secrète – « combat spirituel aussi brutal que la bataille d’hommes » disait Arthur Rimbaud – pour garder ouvertes et battantes les portes de ce pays, ce « contre-sépulcre », même s’il n’est qu’un « vœu de l’esprit », cet inconnu devant soi qu’invoquait René Char sans lequel exister ne pourrait que s’effondrer dans les sables mouvants du libéralisme travaillés par l’argent-roi et le mépris des autres, proches ou lointains. Les poèmes de Thierry Renard, ces « éclats de réalité », disent l’urgence, tous sont écrits avec au bas des reins l’aigu d’une lame, celle du temps ; avec dans les poumons, comme une menace d’asphyxie et dans les yeux, le voile de quelques rêves non encore aboutis capables de tenir la bride au désespoir.

Ici, on écrit toujours au plus proche de ce que l’on ressent. Cela tient de la traversée, c’est une vraie expérience comme telle risquée car il ne s’agit pas seulement d’habiller de mots un vécu, il s’agit bien plus de l’interroger, de le mettre à la question, de le faire parler : « chaque poème est un raid dans l’inarticulé » dit Patrick Laupin des poèmes de Thierry Renard.. Ici, on écrit « pour lire et dire le monde », « aérer le présent », se tenir debout, - quelque soient les coups qui jamais ne manquent surtout quand, comme Thierry Renard, on s’expose. Faut-il rappeler l’animateur infatigable, « l’agitateur poétique » selon ses propres mots, qu’il est, toujours sur la brèche de quelques projets nouveaux – passer avec armes et bagages du côté où l’homme n’est rien que cette chance du jour qui vient.

 

Balise 100-

« Il ne faut jamais avoir peur d’aller trop loin car la vérité est toujours au-delà »  (Marcel Proust)

 

19:00 Publié dans Balises | Lien permanent | Commentaires (0)