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25/02/2007

Joë Bousquet / Simone Weil : une rencontre

(Cette intervention a été faite en ouverture des rencontres du samedi 2 décembre 2006 en présence de Jean Capdeville, dans le cadre de l' exposition de ses livres peints, conçue et coordonnée par René Piniés, directeur du Centre Joë Bousquet et son temps.Son président, Serge Bonnery présidait la rencontre au cours de laquelle on a pu entendre Pierre Manuel, Yves Peyré, Jean Lissarague ainsi que des improvisations de Beniat Achiary. La veille une soirée avait réuni Serge Pey et le guitariste Pedro Soler. Le lendemain une lecture permit d'entendre Jacques Dupin, Philippe Denis, Yves Peyré, Anne de Staël, François Zenone, Serge pey. Je terminai la matinée par la lecture d'un texte écrit pour Max Charvolen.)
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« Je veux d’abord vous dire que vous rencontrer a été pour moi quelque chose de plus que précieux. Je pressentais vaguement qu’il en serait ainsi, mais je ne pressentais pas à quel point » Simone Weil
 
« Rencontrer est le contraire de reconnaître » Gilles Deleuze


Si la source n’existe le plus souvent qu’au pluriel, perdue parmi divers points d’émergence, parmi les sources de notre Centre Joë Bousquet et son temps, il en est une, et ce sont les journées nationales Simone weil-joë Bousquet  des 28 au 31octobre 2000 et la présence forte à cette occasion de Jean Capdeville par son livre Hommage à Simone Weil de 1971 qu’il nous avait confié durant l’été et ses grands papiers où il avait manuscrit quelques pensées comme autant de balises évoquant et soulignant l’importance que la philosophe à la pélerine avait eu pour lui, vie et œuvre mêlées.
Je ne vais pas vous parler de l’histoire de notre centre, je ne vais même pas vous parle de Jean Capdeville – encore que dans les détours, les plis de mon propos…- je voudrais plutôt parler à Jean Capdeville . Que cette adresse « à Jean Capdeville » soit ma manière de lui rendre hommage, de saluer le danseur de corde qui, de clocher à clocher, ces œuvres où chantent les poètes, invente toujours quelques nouveaux pas et trouve là de quoi entrer en résonance, ce bruit d’air sur fond de silence, avec leur paroles. Comment alors ne pas penser à ces mots de Simone Weil, à ces mots qu’il avait choisi de manuscrire sur la page de couverture de son livre de 1971 : « entendre les bruits à travers le silence ». Et bien c’est cela que nous entendons dans « les livres de dialogue », selon l’expression chère à Yves Peyré. Ceux de Jean Capdeville tout particulièrement.medium_IMG_9613.JPG
 
Lui parler et vous parler de qui d’autre sinon de celle dont la lecture lui a « fichu » cette « secousse » qu’il aime à évoquer ; secousse qu’il traduisit en « couleurs, traits, moyens très simples, à plats cernés »…de Simone Weil donc et de celui qui s’est tenu de si longues années, à quelques pas d’ici, dans cette chambre bleutée et ocre, cette ancienne salle de musique avec son dallage si particulier, ces grands carreaux noirs et blancs, propices à quelques mystérieux jeux de dames…ou d’échecs. Joë Bousquet qui allait donc y accueillir Simone Weil en 1942 pour une rencontre qui promettait d’être mémorable. Et qui le fut. Ce dont je voudrais donner quelque idée.

Rencontre brève qu’en d’autres temps j’avais essayé de circonscrire au plus près. – on trouvera plus de détails dans les N°s des Cahiers Simone Weil de décembre 1987 et de septembre 1988 car il fallu apporter un correctif. En effet, s’il est à peu près acquis que Simone Weil débarqua par le train avec Jean Ballard, Directeur de Cahiers du Sud, sur le coup de 2 heures du matin, venant de Marseille, dans la nuit du 29 au lundi 30 mars, si l’on peut être sûr qu’elle se rendit tout de suite chez Bousquet, que Ballard les laissa discuter, qu’elle dormit quelques heures à même le sol, sur la natte qu’elle emportait toujours avec elle, en revanche on ne peut plus affirmer avec Simone Pétrement, le Chanoine Sarraute qu’ils ne se virent qu’une fois. Le témoignage que je reçus de Charles-Pierre Bru, professeur de philosophie et peintre, qui par la suite joua un rôle si important dans la mise sur pied de notre Centre, via le chanoine Sarraute m’obligea à une précision, ce que je fis dans le N° de septembre 1988. Il fallait se rendre à l’évidence Simone Weil s’était rendue deux, voire trois fois ici même, chez Bousquet, avant de partir pour l’abbaye d’En calcat, à Dourgnes dans le Tarn, où elle voulait entendre les chants grégoriens pour pâques qui cette année là tombait un 5 avril.

J’ai dit mémorable pour l’amitié aussi brève – Simone Weil n’avait plus qu’un an à vivre entre l’Amérique et Londres où elle mourut le 24 août 1943 au sanatorium d’Ashford  - que définitive qui naquit de ces paroles et des quelques lettres qui s’ensuivirent – correspondance qu’on ne trouve plus aujourd’hui et que notre Centre se propose de reprendre dès qu’il le pourra augmentée notamment des deux lettres de Simone Weil à Joë Bousquet retrouvées par Florence de Lussy (une du 12 mai 1942, l’autre postée de Casablanca) et publiées dans Les Cahiers Simone Weil de juin 1996.

Amitié dont je voudrais d’une part, donner quelques signes et d’autre part, tenter de fonder.

Dès sa première lettre du 13 avril 1942, elle mettra Bousquet au même niveau que le Père Perrin avec qui elle entretenait une correspondance serrée sur les questions du baptême et de la foi. C’est qu’avec Bousquet, elle rencontrait un homme auquel, loin de toute référence religieuse, l’écart entre l’être et l’existence était chose familière ; l’homme qui, selon elle, pouvait penser l’état actuel du monde dans la mesure où « pour penser le malheur, il (fallait) le porter dans la chair, enfoncé très avant, comme un clou, et le porter longtemps, afin que la pensée ait le temps de devenir assez forte pour le regarder ». Ainsi à ses yeux, Bousquet, blessé depuis plus de 20 ans, « cloué aux mots », selon l’expression de Bernard Noël, était, à ses yeux, infiniment privilégié pour accéder à la connaissance du réel, celle de « l’harmonie pythagoricienne », celle de l’unité des contraires car il portait la guerre logée en lui, ainsi pouvait-il connaître la réalité de la guerre, « la réalité la plus précieuse à connaître parce que la guerre est l’irréalité même » et même si elle recoonnaît qu’il n’est pas encore tout à fait prêt ce que Bousquet acceptait bien volontiers, lui qui affirmera après sa mort à Hélène et Pierre Honorat le 26 janvier 1945 : « Je n’oublierai jamais notre amie. Ses pensées étaient les miennes mais elle se reposait dans les pensées qui m’ôtaient le repos » ou encore à Jean Ballard : « Vous ne sauriez croire combien j’ai été heureux de causer un peu longuement avec Emile Novis. Il n’y a rien à reprendre en elle. J’accepterai volontiers de vivre dans sa peau, sauf quelques substantielles réformes côté ascétisme et plus de complaisance envers le mal. »
 
Parmi ces signes, celui-ci que je vais privilégier. Lorsque Bousquet lui demande « j’aimerais lire de vous des impressions mystiques », c’est bien qu’au cours de leurs conversations quelques allusions avaient été faites au fait qu’elle avait connu de telles « impressions » et en un abandon qui n’est permis qu’à l’amitié la plus vive, elle lui avouera, le 12 mai 1942, comment se récitant à elle-même le poème Love du poète anglais George Herbert (1593-1633) « pour la première fois, le christ est venu (la) prendre » , aveu qu’elle n’avait fait à personne, qu’elle redira, quelques jours plus tard, au seul Père Perrin…

Voyons, finalement qui se rencontre ?
 

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Un peintre et des poètes, Jean Capdeville à Carcassonne du 1 décembre 2006 au 31 mars 2007

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        "Un auteur chante, je danse autour", Jean Capdeville 

Nous sommes à Carcassonne. Dans la Maison des Mémoires, au 53 rue de Verdun où vécut Joë Bousquet. Le centre Joë Bousquet et son temps qui s'intéresse aux relations "écriture/peinture" depuis sa création en 1999 a invité Jean Capdeville à montrer ses livres peints.

L'exposition est à couper le souffle. Vitrines rythmées par quelques-unes de ses toiles où les mots inscrtits de sa main - ceux d'Edmond Jabès, André Du Bouchet, Paul Celan, Jacques Dupin..; plus une bonne dizaine d'autres dont Simone Weil, Yves Peyré, Serge Pey...les siens aussi, parfois - sont tirés du noir par quelques feux tournants dont les cendres blanches demeurent encore vibrantes, rayonnantes dans la dimension d'un possible toujours ouvert. medium_IMG_9617.JPG

Né en 1917 à Saint-Jean de l'Albère (Pyrénées Orientales), Jean Capdeville vit et travaille à Céret. Il a gardé de l'enfance deux yeux étonnés. Rieurs et malicieux, ils vont avec un sourire que son visage bruni à toutes les tramontanes et caressé de tous les soleils, laisse s'épanouir.

Vers les années 1950, deux événements modifient son orientation : la peinture romane et les écrits de la philosophe Simone Weil...«... Les notes de Simone Weil me fichaient alors une secousse, des couleurs donc, des traits, des moyens très simples, minces même, des à plats cernés. La richesse, la vraie, intense dedans...»

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Pour ses relations avec les poètes et les philosophes, le peintre Jean Capdeville explique ainsi sa démarche :

«Des livres illustrés - un auteur chante, je danse autour, avec l'imprimeur et l'éditeur aussi bien sûr -Mon premier livre, en 1968, avec des poèmes de Georges Badin «traces», a été imprimé et édité par Gaston Puel à Veilhes. Quatre choses de moi étaient prévues, reproduites en clichés simples «au trait» que je voulais reprendre à la main. Je n'ai pas aimé les clichés après tirage ; les chosess'écrasaient dans le papier et devenaient lourdes. J'ai repris les clichés, à la main, en les recouvrant de peinture ; sur la lancée, j'ai rempli pareillement 13 pages d'images ; le tout dans un tirage de soixante exemplaires. Renouant ainsi avec les tout premiers livres imprimés et enluminés. Intervenir directement, pour un tirage normal à gravures, était devenu chez nous, dans l'édition, depuis les premiers temps de l'imprimerie un processus totalement étranger ; tout étant mécanisé.L'évolution de l'approche picturale, plus franchement liée au geste et au sériel, autorisant la multiplication des images dans la rapidité et le nombre, mais toujours une à une. Quelques livres au départ : Hommage à Simone Weil, Georg Christoph Lichtenberg, «notes de lectures» en livres,«Ludovic Massé» - tous pareillement illustrés, peintures, réécrits moi-même ou bien en typo locale artisanale. Par la suite tout s'est fait dans la prise en charge matérielle d'éditeurs d'art et de leur imprimerie...»

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C'est cette danse qui nous est donnée à voir.Autant de livres, autant de "Fièvres de paix" écrit Yves Peyré, cela suffit pour une joie! Son dernier livre est une collaboration avec Jacques Dupin. Bleu et sans nom est publié par Jean Lissarague aux éditions l'écart. Peinture et poésie se touchent comme deux voix étrangères et complices, respectueuses de leurs différences. Affaire de rythme!

 © Alain Freixe

18/02/2007

René Char-Lettera Amorosa et ses entours

Inutile de chercher à s’interroger pour savoir à qui est adressée cette Lettera amorosa, d’autant que Char nous a indiqué son véritable destinataire. Il se trouve clairement désigné dans le bandeau qui en 1953 accompagnait la première parution de ce texte. On le trouve reproduit dans le volume de La pléiade à la page 655. Le voici :« Amants qui n’êtes qu’à vous-mêmes, aux rues, aux bois et à la poésie ; couple aux prises avec tout le risque, dans l’absence, dans le retour, mais aussi dans le temps brutal ; dans ce poème il n’est question que de vous. »


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Dans le numéro de la revue Europe – N°705/706, janvier/février 1988 - consacré à René Char, Nelly Stéphane signe un article intitulé L’amour. On apprend qu’il reprend le titre de la revue Le genre humain que dirige aux éditons du Seuil Maurice Olender, professeur à l’Ecole des hautes études en sciences sociales à Paris, de l’automne-hiver 1985/1986. On apprend également que pour cette livraison René Char choisit lui-même dans ses Œuvres complètes de La Pléiade sept poèmes . Ainsi à côté de la Lettera amorosa, p.341, on trouve :
- Singulier, Arsenal in Le marteau san maître, p.10
- Vivante demain, Poèmes militants in Le marteau san s maître, p.36
- Madeleine à la veilleuse, La fontaine narrative in Fureur et mystère, p.276
- L’amoureuse en secret, Le consentement tacite in Les matinaux, p.313
- La chambre dans l’espace, Poème des deux années in La parole en archipel, p.372
- Madeleine qui veillait, Pauvreté et privilège in Recherche de la base et du sommet, p.663

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Chacun pourra rajouter bien d’autres poèmes à ceux choisis par René Char, Allégeance, par exemple, La fontaine narrative in Fureur et mystère, p.278.
Pour moi, même si je ne saurais oublier La complainte du lézard amoureux, La sieste blanche in Les matinaux, p.294 à cause du lagarto de Lorca et de Miro et surtout à cause du Lézard amoureux de notre académie (http://www.ac-nice.fr/daac/lezard/)…pour moi, ce serait Marthe, Le poème pulvérisé in Fureur et mystère p.260. Marthe comme chant d’amour engageant à partager une présence celle dont « l’acte est vierge, même répété », chant rompant avec ce « dur filament d’élégie » dont parlait Mario Luzi qui narcose toujours un peu plus le cœur. Marthe dont René Char écrit qu’elle est « le présent qui s’accumule ».

Alain Freixe

31/01/2007

LU 10 - Clarté sans repos d'Antonio Gamoneda

Prix Cervantès 2006, prix littéraire le plus important d’Espagne, Antonio Gamoneda est le poète de la mémoire, toujours attentif à creuser l’opacité de la langue, à y chercher un rythme qui puisse engendrer le temps où le poème va pouvoir se déployer. C’est le poète de cette « musica callada », de cette musique tue où se joue la vérité du toreo selon José Bergamin. Un chant sous les mots. Quelque chose qui ne s’entend pas et qui pourtant nous parvient comme un silence. Quelque chose comme le ton du corps quand il arrive dans le langage, lueur humide qui s’y assèche non sans ouvrir quelques puits infimes de lumière dans la masse des mots. Et ce qui remonte du corps ce sont « las perdidas », les choses perdues, disparues et qui prennent feu au contact des mots, de l’air qui balaie l’espace du poème.Ce sont ces flammes que l’on lit dans cette Clarté sans repos, aboutissement d’une « expérience à la fois poétique et existentielle, selon Jacques Ancet. Pour un homme qui « a vu » - et l’expression est récurrente ici, foyer d’où s’élèvent les flammes, d’où crépitent les escarbilles – les années de plomb qui suivirent la victoire des forces franquistes, entendu les « vive la mort ; vécu les années inquiètes et désespérées de l’engagement contre la répression de Franco la muerte et voit aujourd’hui le vieillir lever lentement depuis le fond du corps, la mémoire est mortelle tant on risque toujours de « (s’exténuer) inutilement / dans les souvenirs et les ombres. »Si le récit est le lieu par excellence de la mémoire, si raconter, c’est toujours vouloir d’une certaine manière conserver, maintenir intact, si on y bâtit des palais chimériques, en revanche les poèmes d’Antonio Gamoneda dont des narrations qui s’ouvrent sur les ruines d’un impossible récit. Ruines d’une existence rompue dont il ne reste que des bribes, des braises sous les cendres. Et qui perdurent. Les poèmes sont des fictions de l’oubli. Ils se déploient autour d’un trou, d’un centre qui manque. D’un oubli. C’est en lui qu’entre Antonio Gamoneda, lui qu’il s’efforce de dire en ces blocs rythmiques dont il n’importe plus de savoir si ce sont des vers, des versets ou des proses. Des présences que la nuit qui tombe fait rougeoyer, et c’est l’absence de ce qui est absent qui lève et se montre. Cette clarté sans repos est celle qui préside aux errances dans le labyrinthe, aux longs des lignes brisées de son tracé, de ses pièces et galeries. Là dérive la mémoire, détachée de tout ancrage, de toute mémoire ordonnée, là « brûlent les pertes » - Mots qui littéralement traduisent le titre espagnol initial Arden las perdidas -  et le sujet qui s’y aventure se perd dans les fils de la mémoire devenue épervier d’oubli. Non d’un oubli pur et simple mais d’un oubli en acte, pensée qui se sait désarticulée, qui comprend qu’elle erre dans un labyrinthe, impuissante à rétablir les liens entre les pièces qui s’ouvrent, à raccorder les corridors entre eux. Dans les pages de cette clarté sans repos, Antonio Gamoneda a su faire parler l’oubli sans avoir prise sur le secret. Perdu désormais.
 
( ntonio Gamoneda, Clarté sans repos, (traduit de l’espagnol par Jacques Ancet), Arfuyen, 18 euros )

Lu 9 - Les silences du passeur de Jean-Max Tixier

Après la métaphore du chasseur – Voir son précédent livre paru aux éditions du Cherche-Midi, Chasseur de mémoire en 2001 – que travaillaient déjà l’âge, le silence et le vide, celle du passeur s’est imposée à Jean-Max Tixier pour rendre compte de la position du poète pris entre écrire et vivre, aujourd’hui que « l’ombre attend sur le quai ».Aujourd’hui, l’autre rive se dessine. Approche dans les clapots. Les vents sont tombés, la clarté en est resté comme voilée. Tout a vieilli n jusqu’aux silences. C’est pourtant sur eux que va s’appuyer le passeur pour poursuivre tant sa passion est de passer, debout sur sa barque, les yeux jetés à l’avant comme pour le tirer jusqu’à lui.Que reste-t-il au final quand « la musique n’est plus / ce qui s’ajuste au cœur », quand «  à l’abrupt du vertige. Plus rien ne (nous) retient des images antérieures. Les sites traversés ont glissé dans l’oubli. Le visage des femmes aimées. Et leur sourire de brume. » ? Rien d’autre qu’à entrer dans l’oubli et risquer à partir de lui, du labyrinthe qu’il dessine quelques mots, choisis, posés et ajustés par cet artisan du verbe qu’est Jean-Max Tixier qui connaît leurs potentialités comme leur fonction poétique. Pris dans leur matérialité sonore et visuelle que ce soit dans des poèmes en prose ou en vers libres longs comme courts – on rencontre ces trois formes dans ce livre – ils s’ouvrent sur des strates – vers le bas – et des étages – vers le haut – de sens.Dire l’oubli, c’est faire venir sur le devant de la scène du poème, où les mots disent les absences, entre les mots l’absence elle-même. C’est dans cet acte que « le vide affronte le silence », en lui que « le courant emporte les images / à quoi s’accorde le regard », là vit le désir « qui survit au désir ».
C’est à partir de lui que jean-Max Tixier peut affirmer « parler pour n’être pas vaincu ». Car c’est ici que tout se passe. Ici qu’est l’autre rive. Ici et dans l’amour de la « femme de fin dernière », entrer dans la sérénité du froid mais « dans le soleil » et « épouser l’immobilité ». Et cela n’est pas se résigner mais « changer d’avenir ».
« Mes mots donnent la chair / à ce qui n’en a pas » écrit Jean-Max Tixier. À quoi je rajouterais volontiers qu’ils ouvrent des yeux dans la langue que tant de choses aujourd’hui ferme, replie sur elle-même, emprisonne dans une absence de sens coupable. Jusque dans ses « silences », le « passeur » nous assure encore que le feu de poésie peut prendre dans la langue et l’on sait, aujourd’hui comme hier, combien sa lumière et sa chaleur nous sont nécessaires.
 
 ( Jean-Max Tixier, Les silences du passeur, Le Taillis Pré, 17 euros )

09/12/2006

Turbulence 7 - Jérôme Bonnetto, Vienne le ciel et le personnage de roman

Le 18 novembre 2006, à la Bibliothèque Municipale à Vocation Régionale Louis Nucéra de Nice, Jérôme Bonnetto après une très belle lecture, retenue et juste, d’extraits de son livre Vienne le ciel publié dans la collection Thoth des éditions de l’Amourier, a énoncé une idée bien intéressante concernant la création littéraire recoupant celle d’inspiration, de plan de travail, etc…La question était celle de savoir si Vienne le ciel était un roman. Jérôme Bonnetto a accepté l’idée que s’il y avait une chose dont on pouvait être sûr, c’était que le personnage était essentiel au roman – Y compris après les divers décapages du Nouveau Roman encore que nous ne lui ayons pas posé cette question – Du coup, il nous a présenté sa manière à lui – difficile et de type chantier entre décombres, gravats et matériaux divers– de chercher et de faire naître un personnage .Deux possibilités, a dit Jérôme Bonnetto , soit on part d’une structure préétablie, une architecture de récit et des personnages déjà à peu près définis, à l’armature psychologique forte…- Et avec quelque talent, on écrit – soit – et c’est la voie de Jérôme Bonnetto – la langue est première. Ainsi pour Jérôme Bonnetto il lui faut errer dans la langue et par tâtonnements, essais d’écriture, mots, tours syntaxiques, rythme, remuer la langue jusqu’à trouver une langue, celle du personnage, celle qui mettra au monde le personnage.
Le personnage comme être de langue, c’est là une voie de poète. Le personnage qui en sort ne peut qu’en demeurer marqué. D’où l’importance pour lui des monologues intérieurs. Ada est d’abord un phénomène de langue. Du coup les autres personnages de Vienne le ciel, le photographe surtout, Alexandre même ont moins de présence.
Pour les poètes, le langage n’est pas un simple instrument de communication, il est ce qui toujours naît au point de friction de notre conscience et du monde. Là, des images, un rythme qui s’habille de mots, naissent.
Dirais-je qu’une fois trouvée la langue et donc le personnage, le danger que court un romancier tel que Jérôme Bonnetto, c’est de tomber amoureux de son personnage. Pourquoi danger ? Parce qu’il risque de s’enivrer de sa musique et oublier le drame du sein duquel est né le personnage, non ?
© Alain Freixe

25/11/2006

Yves Ughes/Alain Freixe - Soirée « Rappelez-vous… »

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C’était à Antibes le 20 octobre dernier. Arielle Rometti et Isabelle Viennois nous accueillaient dans leur transArtcafé pour une rencontre/lecture autour de cette plaquette que l’ami Yves Perrine a bien voulu accueillir dans sa revue Poésie en voyage aux éditions La Porte. De Sapho aux belles Lyonnaises, La Labé et la Desborde-valmore, des troubadours aux surréalistes en passant par quelques poètes espagnols, italiens ou allemands, ce sont quelques trente-six visages de la poésie , trente-six « indisparaissables » dit Raphaël Monticelli dans sa préface ! - qu’Yves Ughes et moi-même avons tenté, entre mémoire et langue, d’évoquer.Trente-six voix qui disent que tenir est possible. Que maintenir est l’urgence.

21/11/2006

André Frénaud, poète métaphysique?

(Texte remanié d'une conférence prononcée à La Maison de la poésie de Grasse le vendredi 17 novembre 2006 à l'invitation de l'association Podio qui travaille pour "la défense et 'illustration de la poésie à Grasse.

J'invite ceux qui souhaiteraient prendre connaissance des poèmes lus lors de cette intervention à se procurer les livres. L'oeuvre poétique d'André Frénaud se trouve maintenant disponible sous la forme de 5 volumes dans la collection Poésie/Gallimard)

                               

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« Oublions les choses, ne considérons que les rapports"

Braque 

 

 

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Et d’abord pourquoi André Frénaud ?

Peut-être à cause de ces mots de Bernard Noël rencontrés dans son article sur jacques Dupin paru dans Strates, volume collectif dirigé par notre ami Emmanuel Laugier : « Peut-être Jacques Dupin a-t-il des frères en Pierre-Jean Jouve et en André Frénaud, il n’a pas de semblable », mots qui font signe vers une voix, un  timbre singulier, une manière unique de remuer la langue et de la faire sonner de manière tantôt assourdie et tantôt agressive…

Peut-être à cause de cette solitude dans le paysage poétique des années 50/80 qui le voit persister alors que s’imposent fragments et dis-jonctions à écrire de longs poèmes qui sont  autant de vastes méditations, autant « d’affrontements de la nuit qu’il avait en lui », selon les mots d’Yves Bonnefoy.

Peut-être à cause de ces mots anciens de Montale qui en 1953 écrivait : « La poésie est appréhendée par lui comme un acte vital qui porte et résout en soi toutes les contradictions par le fait même de les vivre (…) c’est le seul monde où puisse évoluer u !n homme comme André Frénaud, poète de grande culture, mais qui ne croit pas à « la littérature », individualiste, sinon anarchiste, disons un esprit réfractaire qui ressent pour les hommes une « piété » infinie et qui ne pense pas qu’on puisse les racheter à coups de trique, comme on le fait des brebis égarées. »

Ou ceux de mon ami Gaston Puel qui dirigea en1981 un N° spécial de la revue Sud sur André Frénaud et qui écrivait dans sa préface que ce dernier « se (présentait) à nous comme l’un des poètes français les plus nécessaires à notre survie d’homme de 1981 »

Peut-être à cause des paradoxes que souligne Gaston Puel: -    homme qui commence par la fin. Ainsi le poème Epitaphe qui date de 1938 et ouvre son livre Les rois mages paru en 1944 chez Seghers

Lecture de Epitaphe, Les Rois mages, Poésie/Gallimard, p.15 (30 ‘’)

-    homme qui aime les hommes mais qui écrit un ‘je me suis inacceptable » !


-    athée qui ne cesse de revisiter la tradition chrétienne


-    révolutionnaire tôt revenu de ses rêves mais qui pas de son idéal de justice


-   amoureux de la nature qui déclare que « toujours les grandes villes (l’)ont troublé plus que la nature qui est trop claire et qu’elles seules donnent « le sentiment de ce que l’on n’atteint pas »

- amoureux de son « vieux pays » de Bourgogne mais qui avoue s’être épris définitivement de l’Italie et peut-être à un degré moindre de l’Espagne.

On pourrait continuer...


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15/10/2006

Lu 8 - La parole-lichen d'Antoine Emaz

( Antoine Emaz a publié en 2004 aux éditions Tarabuste avec des dessins de Djamel Meskache, Os.)

Là où le sol manque – ou un peuple, si l’on a lu Gilles Deleuze – la parole pour peu qu’elle sache se faire lichen n’est pas tout à fait démunie. Cette « parole lichen » est celle qui dans le poème d’Antoine Emaz tient toute sa poésie. En constitue la veille . Discrète et obstinée. Endurante. Quoiqu’il arrive. Elle se développe dans ce livre en 34 poèmes-lichens tous datés et disséminés sur de 5 mots-rocs : os, calme, ombre, peur et vieux.
Et qu’est-ce donc qu’une « parole lichen » ?

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19/09/2006

LU 7 : La méthode Stanislavski de Claire Legendre

La méthode Stanislavski, on tourne autour de ce titre de Claire Legendre publié chez Grasset, soit parce qu’on sait – ou croit savoir – ce qu’il en est de ce chemin supposé sûr puisqu’on s’intéresse par ailleurs au théâtre et que forcément on a rencontré Stanislavski, soit parce que plus simplement on a lu la quatrième de couverture !medium_Claire_VII_Vintimille_.JPG.jpg
Ainsi va la lecture, on tourne les pages sans cesser jamais de se demander comment le récit qu’entreprend Graziella Vaci, pensionnaire de la villa Médicis à Rome, fascinée par cet « emblème de notre génération perdue » qu’est à ses yeux S.A.R, tueur des trains, et qui débouche sur l’écriture d’un scénario de film vite transformé en pièce de théâtre dont un metteur en scène connu, Vlad, va vouloir assurer le devenir scénique ; oui, comment ce livre va finir par tendre vers son titre. Et faire flèche.
On le sait la méthode de Stalisnavski ne concerne pas le roman – Qui connaît Claire Legendre sait que de Making off ( éditions Hors Commerce, 1998, repris in J’ai lu) à Matricule (Grasset, 2003) en passant par le très médiatisé Viande (Grasset, 1999), il n’y a pas de méthode chez la jeune romancière, tout au plus, et j’emprunterai ces mots à Jean Echenoz que l’on croise – en clin d’œil admiratif ? – dans La méthode Stanislavski, « une appréhension, aux deux sens du terme, de ce qu’on veut raconter et de la façon dont on veut le raconter » - mais bien le théâtre et plus particulièrement la formation de l’acteur, titre traduit de l’américain et préfacé par Jean Vilar en 1958, et la construction du personnage.
On pourrait dire de ce livre de Claire Legendre qu’il est un roman policier. Et certes tous les ingrédients sont présents : un meurtre, un séduisant commissaire, un assassin, la villa Médicis et le monde de l’art contemporain pour décor …Et j’aime, dans ce livre, la montée lente vers le terrible, me plais à l’ironie douce de quelques descriptions – La villa Médicis que je ne connais pas comme le festival du livre de Nice que je pourrais connaître mais dont je me garde encore – à cet art de l’intrigue que Claire Legendre maîtrise : fausses pistes, impasses, rebondissements, mobiles souterrains, calculs, non-dits… toute cette réalité où l’on ne s’avance que masqué comme l’autre sur le grand théâtre du monde, des amours et des fêtes – nous sommes à Rome ne l’oublions pas, Rome et son décor, ses flèches baroques, ses trompe-l’œil, ses faux-semblants et ce parfum de secret qui flotte, ces passions tues. Mais ce serait en amoindrir l’enjeu et la portée puisqu’on ne pourrait le comparer qu’aux romans du même genre.
Alors ? Dire qu’il s’agit d’un livre sur le théâtre serait bien court et réducteur. Ce roman est le livre d’un autre texte dont nous ne connaîtrons que quelques passages, bribes d’un objet littéraire laissé en amont, non perdu sinon voué à passer dans les corps des acteurs Léa et Ali. Texte voué à devenir parole, à produire du jeu, à être porté sur la scène par l’entremise de Vlad, fervent partisan de la méthode de Stanislavski. Parodiant René Descartes, on pourrait dire « pour bien conduire » l’acteur « à chercher la vérité » du personnage à partir de sa propre vérité, si par ce terme on entend sa « mémoire affective » : matériaux disparates d’affects, sentiments, souvenirs…Livre d’une fascination moins pour les tueurs en série finalement que pour les metteurs en scène qui inventent le spectacle avec les acteurs, aidant à l’apparition de la parole et donnant à la présence de l’acteur tout son poids, courant le risque de la vérité.
Avec la méthode de Stanislaski, il n’est plus question de grimace ni d’artifice. L’expérience traverse la technique. La déborde. Un événement advient qui subvertit la représentation même. Là, le texte littéraire peur rencontrer sa corne – Vous vous souvenez de Michel Leiris, de sa « littérature considérée comme une tauromachie » ? « Faire un livre qui soit un acte » était son désir le plus vif – et devenir, sur le plateau, ce qu’il était mais en puissance seulement. Jouant, l’acteur énonce la parole, arrive à se mettre à l’endroit où la parole devient possible. Concrète. Réelle. Parole qui aura prise, fera trait – cette flèche et sa plaie – sur le spectateur. Traversé par la parole, il est parlé si loin qu’il en bégaye avant de se taire. Silence, terreau pour l’acte en fleur. Ici, un crime. Le Mal.
Que dire de l’écrivain, de la littérature sans cette « part maudite » du jeu, de l’alea, du danger ? Oui, que dire ? Et Claire Legendre en claire jeune fille s’esquive non sans nous adresser, se retournant, un énigmatique sourire.

© Alain Freixe

11/09/2006

Lu 6 : Viendra-t-il le ciel?

Il y a tant de choses que nous ne verrons pas ! Tant de nuits à l’intérieur du jour. À rôder en lisière, sur les bords déchiquetés des hommes quand ils aiment. La littérature s’affronte toujours à la même question : comment raconter l’irracontable ? Et toujours tentant cela, toujours ses pages nous font entrevoir sinon cette nuit du moins les premières vagues d’une d’entre elles.
Pris entre beauté convulsive des surréalistes et construction maîtrisée du Nouveau Roman, Vienne le ciel est un beau récit, publié aujourd'hui par les éditions de l'Amourier dans leur collection Thoth. Beau d’être aussi troublant. Qu’une « mère soit le cadavre d’une femme amoureuse », si cela ne peut se dire, cela peut s’écrire. Se composer. C’est tout l’art de Jérôme Bonnetto que de bâtir un récit comme une mosaïque où jouent des voix narratives multiples. L’effet de brouillage dure peu, très vite on repère les différentes tesselles , leurs couleurs et nuances. Jamais on ne perd le fil du chemin invisible, ligne de fracture interne qui parcourt l’épaisseur et l’obscurité de la vie d’Ada comme dans ces cristaux si transparents qu’on finit par y noyer ses yeux.
Allez, comme de juste, je vais m’exécuter et m’efforcer de répondre aux fameuses questions ; de quoi ça parle ? Qu’est-ce que ça raconte ? Pour le dire vite et j’espère pas trop mal : un photographe – on a son carnet – propose à une jeune femme, Ada, de la photographier tout au long d’un « voyage sentimental » qui va les conduire de Prague à Paris, puis Tokyo, Petersbourg, encore Prague et enfin une ville imaginaire, celle de ce dernier chapitre où se mêlent alors qu’un bateau s’en va emportant l’homme aimé, les voix d’Ada et de son fils Alexandre. Alors pour que vienne le ciel, une mère demande à son fils de la tuer en lui brisant la nuque au moyen d’une pierre, celle-là même qu’il est devenu. Pour que Vienne le ciel, il faudra bien des prières. Des folies. On laissera aux lecteurs le soin de décider s’il viendra ou pas.
Compositeur ai-je dit, monteur aussi bien. Dans ce récit où la problématique photographique, cette folie de l’instantané, cette fraction, ce point de présent déjà enfui se croise avec la problématique littéraire qui se développe, elle, à l’aventure, les éléments se mettant en place chemin faisant – écrire ne saurait se faire qu’au présent . Dans les deux cas, on cadre. On coupe. Comme le tailleur de tesselles. Puis on met en place. On agence. On monte. Douleur et lumière de ce qui tient on ne sait plus trop comment tellement les lignes de narration deviennent souples et comme poreuses. Comme dans ce dernier chapitre où sans le soutien d’une quelconque ponctuation s’impose le rythme qui emporte ce chant d’amour. Et de mort.

© Alain Freixe

10/09/2006

Lu 5 : Serge Bonnery, homme du Midi noir

Après "Une patience", ce récit qui à partir d’un objet – cette planchette percée d’une rainure, dont les soldats se servaient pour astiquer leurs boutons – laisse s’opérer – avec « un tremblé dans l’écriture » dont Yves Ughes disait qu’il « était cultivé comme un acte de fidélité » - un lent travail de mémoire autour de la figure d’un grand-père, ancien poilu de 14-18 ; après Le temps d’un jardin où le grand-père est convoqué mais cette fois comme donateur de « l’amour des choses terrestres », voici "Les roses noires", aux éditions de l'Amourier, collection Thoth, une histoire d’amour, un récit d’enfance si l’enfance n’est pas seulement un âge de la vie repérable sur la ligne du temps mais ce qui n’arrive jamais à se dire. Et comme tel fait retour. En fantôme obstiné.
Le tempo de l’écriture de ces trois livres diffère. Les roses noires sont un texte qui fait du silence et du secret, de l’attente, du mystère et de l’oubli, son sujet. Quelque chose se tient caché dans ce texte, quelque chose qui est ignoré du texte lui-même. Et c’est peut-être de savoir ce que c’est que d’aimer…
Si le récit est bien le lieu même de la mémoire ; si raconter, c’est bien conserver, maintenir au plus près ce qui fut vécu, Les roses noires nous content l’histoire d’une perte. Ce qui a été vécu, la mémoire même du narrateur se trouve dans un carnet, Le cahier noir de Jean, qu’il finit par ne plus retrouver…Du coup, Les roses noires pourraient être lues comme la tentative de reconstituer l’histoire consignée dans le cahier noir. De là son apparence labyrinthique, ces pans de narration que le narrateur s’efforce en même temps de comprendre et d’interpréter afin d’en faire apparaître la part de vérité. Ruines d’une écriture rompue, en miettes. En charpie.
L’écriture de Serge Bonnery, ses modulations développent un phrasé, un tempo qui tend un fil invisible entre ces moments de vie. C’est lui qui fait bouquet de ces roses noires.
Et c’est au lecteur de les disposer dans le vase qu’il aura choisi.

© Alain Freixe